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lundi 15 août 2011

Kabila ou Tshisekedi, l'instant de vérité (I)





Qui pèse quoi dans quel coin du pays et pour quelle force en termes d'inscrits sur la liste électorale? C'est la question qu'il vaut mieux se poser pour éviter toute surprise au moment de la proclamation des résultats.

Qui sera le prochain président de la RDCongo à l'issue de l'élection présidentielle du 28 novembre 2011? La question mérite d'être posée eu égard à l'évolution de l'actualité sur le terrain : déploiement de la Commission électorale nationale Indépendante -CENI-, adoption par le deux chambres du Parlement des annexes à la Loi électorale sous forme de loi portant fixations des circonscriptions électorales et répartition des sièges des députés nationaux et provinciaux, mise en place imminente du Conseil supérieur de l'audiovisuel et de la communication -CSAC-, euphorie de la précampagne dans tous les camps politiques ..., tous les ingrédients sont réunis pour des joutes très disputées lors de cette présidentielle couplée avec les législatives nationales. Auréolé par le succès récolté au Katanga et à Kinshasa avec, cerise sur le gâteau, son meeting historique de mardi 9 août 2011 au stade des Martyrs, Tshisekedi reste rassuré que la victoire est de son côté, même en faisant cavalier seul. Kabila, lui, en force tranquille, et contraint au devoir de réserve lui imposé par ses fonctions au sommet de l'Etat, se prépare minutieusement et croit rempiler. Vital Kamerhe, fiché bon outsider, et Kengo toujours embusqué malgré on flop du stade des Martyrs croient à l'union de l'Opposition pour battre Kabila. Si du côté de la MP la sérénité affichée s'explique par la discipline apparente au sein de cette plate-forme, du côté de l'Opposition, la fédération des forces est une impérieuse nécessité si elle veut accéder au pouvoir : à la Présidence et à la Primature. Analyse.

«Tout dépend du nombre de sièges attribués aux circonscriptions combinés avec l'encrage qu'a chaque camp politique en fonction de la force de mobilisation», énonce prudemment un observateur qui a du mal à prédire la victoire d'un camp au détriment de l'autre lors de la présidentielle jumelée avec les législatives prévues le 28 novembre 2011. Tshisekedi, président de l'Union pour la démocratie et le progrès social -UDPS-, adoubé par ses deux succès, l'un récolté dans la propre province de Kabila et l'autre à Kinshasa. Se voit déjà Président le 6 décembre 2011, faisant fi de la date de proclamation des résultats de la présidentielle fixée par la CENI et du délai constitutionnel requis pour un éventuel recours en contestation des ceux-ci. C'est dans cette perspective qu'il invite, à demi-mot, le peuple RD-congolais, à travers les militants de son parti, à prendre ses responsabilités à compter de cette date. Du côté de la majorité, personne ne le prend au sérieux. Tous affichent une sérénité, prédisant la victoire sans encombre de Joseph Kabila. De manière générale, sans éléments statistiques, la Majorité croit rempiler. Pour les observateurs, il faut analyser les données réelles du terrain.

Des chiffres effrayants

Ces données sont notamment les quotas gagnés par chaque circonscription à l'issue de l'opération de révision du fichier électoral et de l'adoption de la Loi fixations des circonscriptions électorales et répartition des sièges des députés nationaux et provinciaux. Qui pèse quoi dans quel coin du pays pour quelle force en termes d'inscrits sur la liste électorale? C'est la question qu'il vaut mieux se poser pur éviter toute surprise au moment de la proclamation des résultats.

A Kinshasa par exemple, la cartographie électorale indique que la capitale se partage, selon le récent sondage Les Points, entre quatre principales forces. Il s'agit du Parti lumumbiste unifié -PALU-, l'UDPS avec une popularité supposée, du MLC et, dans une moindre mesure, du PPRD. En gros, en 2006, le MLC avec tous ses alliés s'était arrogé 24 députés provinciaux contre 22 pour la Majorité sur le 46 que compte l'Assemblée provinciale de Kinshasa. Un indice très sérieux, à prendre absolument en compte d'autant plus que le second tour de l'élection présidentielle synchronisé avec la députation provinciale a fait transparaître une réalité autre que celle du premier round. Cette réalité n'est pas loin des pourcentages enregistrés par les deux challengers second tour de l'élection présidentielle de 2006. La situation a peut-être changé. Mais les observateurs ne perçoivent pas un grand fossé entre les chiffres de 2006 et ceux de 2011, malgré l'entrée en scène de l'UDPS dont un grand nombre de sympathisants avaient préféré voter pour Bemba et le nombre d'enrôlés qui augmenté de près de 7 millions. Dans ce chiffré, il faut compter certains partisans de l'UDPS et un grand nombre de jeunes fraîchement inscrits. Où iront ces 7 millions? C'est l'autre question qui mérite d'être posée.

Si dans le camp tshisekediste, l'on chante déjà la victoire, au vu de la mobilisation au Katanga et surtout celle du stade des Martyrs le 9 août 2011, des analystes de la MP ne voient dans cette mobilisation qu'une foule en majorité des curieux et non des électeurs acquis à la cause du lider maximo. Député PPRD élu de Kinshasa, Francis Kalombo banalise ces prouesses de l'UDPS et fait part du prochain meeting de son parti aux Martyrs et abords en vue de prouver de quoi le PPRD est désormais capable dans la capitale. Nul n'ignore que Kinshasa qui avait un quota de 58 députés en 2006 a perdu 7 sièges à l'issue du nettoyage du fichier électoral pour les élections de 2011. L'entrée en lice d'Etienne Tshisekedi a fait craindre un accroissement du nombre d'enrôlés, la capitale étant réputée acquise à l'opposition, mais la réalité de l'enrôlement prouve juste le contraire. Considérant que Kinshasa garde le même degré de sympathie envers les camps politiques qu'en 2006, l'opposition perdrait 4 sièges, puisqu'elle avait un peu plus et la majorité trois sièges. Difficile de parier que Kinshasa offrira un triomphe à l'Opposition avec la naissance de certains nouveaux partis dont le leaders sont des élus et peuvent rallier la prochaine majorité peu importe ses piliers. Difficile également de parler pour Kabila, malgré la réalisations des chantiers à un rythme intéressant. «Les Kinois attendent le riz et le poulet dans les assiettes et non les chantiers», entend-on dire. Mais la présence du Président au lancement de la deuxième phase des travaux de modernisation du boulevard Lumumba avait fini de démontrer qu'il avait, lui aussi, progressé en termes de popularité dans la capitale. En témoigne, la procession qui s'en était suivie. En dépit de ce regain de forme du Président, à L'UDPS, on ironise qu'un élève -Kabila qui a réussi un seul chantier -infrastructures- sur cinq ne peut passer de classe. Plus proche de Kinshasa, la Majorité a gagné d'un chiffre près le poste du gouverneur de province en 2006, alors que mathématiquement, l'Opposition partait favorite. Rien n'indique que la situation est améliorée en faveur d'un camp. L'ombre de Ne Muanda Nsemi, le gourou de la secte Bundu dia Kongo, continue à planer sur la province. En coulisse, les Ne Kongo de l'Opposition comme ceux de la Majorité se disent presque tous adeptes de BDK, qui serait plutôt un état d'esprit qui prévaut plus que toute autre considération. Le Bas-Congo voterait l'Opposition malgré les efforts de reconstruction, dans le secteur des infrastructures et de celui du social, déployés par le gouverneur de province, Simon Floribert Mbatshi, nommé il y a peu président de l'interfédéral du PPRD. Quelques jours après son installation par le secrétaire général du PPRD, Evariste Boshab, l'interfédéral est mise à rude épreuve avec cette mobilisation inattendue de Vital Kamerhe, président de l'Union pour la nation congolaise -UNC-, la nouvelle coqueluche des masses RDCongolaises. Dans les Kivu, Kamerhe n'a pas eu du mal à drainer des foules. Il tente présentement avec l'appui de Ne Muanda Nsemi, la mobilisation, surtout dans la ville de Matadi, chef-lieu de la province. Un véritable carton. Le Bandundu présente la même configuration que Kinshasa, mais avec une prépondérance du PALU, dont le patron, Gizenga, reste un dieu pour ses partisans. Malgré le délestage de la province pendant la gouvernance PALU-PPRD, il sera difficile d'y déboulonner le patriarche. La seule équation à résoudre du côté de Kabila, c'est de clarifier ses relations avec ce parti le mieux structuré de la RDCongo avec le Mouvement social pour le renouveau -MSR- et donner des gages de sûreté pour s'attirer une fois de plus les voix de ses militants.

Kabila entouré par un isolant thermique

Si à l'Ouest la tendance et au statu quo, l'Est risque de réserver des surprises. Les observateurs perçoivent un partage des suffrages entre Kabila et Vital Kamerhe. Si l'on n'y prend garde, le Sud-Kivu porterait son dévolu sur Vital Kamerhe. La notabilité de ce coin du pays fustige le bannissement de leur fils, qui avait pourtant, mouillé la chemise pour Kabila mais se voit remercié comme un coq, qui réveille le village à 5h00 et sert de repas le soir dès qu'un premier visiteur se pointe. Vital n'est peut-être pas le seul dans ce cas. Moïse Katumbi ne cesse d'alerter l'opinion et attirer l'attention de Kabila sur le comportement d'un certain entourage, passé maître en délation, qui isole le président pour bien se servir de lui en lui soutirant des sommes faramineuses avec promesse d'adhésions. Le PPRD ne mobiliserait jamais sans motivation financière des organisateurs des manifestations et des militants. Kabila a du pain sur la planche. Elu de Kinshasa avec une popularité incontestable, Plus Muabilu est de ceux-là qui dénoncent l'encerclement de Kabila par un isolant thermique qui travaille pour la descente aux enfers de l'Autorité morale de la MP. Le Maniema votera certainement Kabila, mais ne pèse que 874.809 électeurs potentiels soit autant des voix et 14.députés nationaux. Le Nord-Kivu, très réservé, continue à déplorer le manque de la paix totale, promesse Sur laquelle il a voté Kabila. «Autant vous méfier lorsqu'il faut parler de Kabila' à Goma, chef-lieu du Nord-Kivu. Les gens sont très indifférents», rasure un originaire de passage à Kinshasa. La Province Orientale, 3.886.524 et 61 députés nationaux après avoir perdu 2 sièges et le Katanga -4.627.302 enrôlés, 72, députés nationaux- avec un taux d'accroissement de 3 députés, resteraient acquis. à Kabila. Les deux Kasaï, 2.643.905 enrôlés -oriental- avec 41 députés nationaux et 2.661.246 enrôlés -occidental- et 42 députés nationaux, à part le Sankuru et le Kabinda, garderaient leur penchant pour l'Opposition. Les deux provinces ont gagné chacune deux sièges à l'Assemblée nationale. Sentiment renforcé par l'entrée en lice d'Etienne Tshisekedi et la non-réalisation des promesses électorales. Même un éventuel débauchage de François Muamba Tshishimbi dit Muamaba wa mayi dans son Kabeya-Kamwanga en faveur du camp kabiliste ne changerait pas grand-chose. La situation à l'Equateur est pire. Orpheline' depuis l'arrestation de Jean-Pierre Bemba,' l'Equateur, 3.960.643 enrôlés et 62 députés après en engrangé 2 sièges supplémentaires, a entrepris de faire un sursaut d'orgueil avec la sortie du parti de Léon Kengo wa Dondo, Union des forces du changement. -UFC- en plus de l'alliance qui ne dit pas encore son nom entre Kengo et Bemba. Le président du Sénat a rendu dernièrement et de manière discrète visite au prisonnier de Moreno Ocampo. Kengo ne serait pas candidat 'mais il plaide pour un candidat commun de l'Opposition. Tshisekedi, candidat déclaré,' parle plutôt de son droit naturel de postuler à la magistrature suprême et invite les autres à concourir librement ou à le rallier. Kamerhe pense à la candidature unique assortie d'un ticket constitué du Président et d'un Premier ministre avant l'élection. Secrétaire général du RCDN de Roger Lumbal, Moïse Moni Della, dans la même logique que Kamerhe, préconise l'élargissement de ce ticket à Kengo pour faire le plein des voix.

Le salut de Kabila

Tout compte fait, et par extrapolation, si l'on met d'un côté les provinces acquises à Kabila et de l'autre celles acquises à l'Opposition et au centre les provinces à partager, il y a lieu de conclure que les joutes seraient très intéressantes. A noter que le quotient électoral est de 64.049,28 électeurs pour un nombre total d'enrôlés de 32.024.640 et 500 députés; les provinces acquises à Kabila étant la Province Orientale, le Maniema et le Katanga et le nombre total d'enrôlés pour ces provinces est de 9.388.635, soit près d'un tiers des voix et 147 député nationaux. Pour les provinces acquises à l'Opposition, les deux Kasaï, le Bas-Congo et l'Equateur: 10.768.732 enrôlés soit plus d'un tiers et 168 députés. Et les provinces à. partager, Kinshasa, le Bandundu, le Nord-Kivu et le Sud-Kivu, représentent 11 .867.273 enrôlés soit plus d'un tiers et 185 députés à partager. Le tout se jouera dans ces provinces où Kabila, avec l'Allié PALU à l'Ouest et le MSR à l'Est, Kabila peut, bien, se comporter. Mais tout n'est pas encore joué tant que les derniers réglages et ralliement ne se  sont pas encore opérés. Le plein réalisé par Tshisekedi et Kamerhe est à mettre sur le compte de la dynamique de la campagne. Les stratèges tant de la Majorité que de l'Opposition ont tout intérêt à concocter des véritables plans pour prétendre à une victoire. En ce qui concerne la Majorité, nombreux pensent à la constitution de l'Union de la gauche composée du PPRD, qui doit d'ores et déjà revoir ses ambitions à la baisse au lieu de continuer à faire miroiter un triomphe qu'il est en réalité et sauf miracle incapable d'offrir à Joseph Kabila, du PALU, du MSR, de la CCU de Mende et d'autres forces émergeantes de gauche. Ceci ne voudrait pas dire que les autres bonnes volontés qui veulent accompagner Kabila seraient exclues. Force est de reconnaître qu'au départ, il est une impérieuse nécessité de regrouper toutes les forces de gauche dans un noyau fort avant de s'attirer d'autres sympathisants.

Du côté de l'Opposition, la stratégie qui paraît la mieux adaptée est de fédérer autour de Tshisekedi comme candidat unique et commun et constituer un ticket qui intégrera Kamerhe, Kengo et d'autres leaders de l'Opposition capables de mobiliser pour la victoire de cette famille politique, en vue de l'alternance. Nul ne sait si le rapprochement MLC-UN intervenu le week-end dernier pourrait être le détonateur -. L'instant de vérité est proche.

Tino MABADA
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Sacrebopol, Le Jalon Congolais
 
 
 

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