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jeudi 15 décembre 2011

Réélection contestée de Kabila

Politique-RD Congo - Qui sauvera le pays ?


" L'Union africaine (UA), à la langue de bois et dont les observateurs vident les lieux sans crier gare ? L'Occident aux multiples retournements de vestes ? Comment ? En se décidant à larguer définitivement celui qui, jusque-là, a défendu tant bien que mal ses nombreux intérêts ? Une chose est sûre, le dernier mot appartient aux Congolais eux-mêmes. Ils doivent se montrer capables de tirer les leçons du passé"


 Les critiques pleuvent à propos du dernier scrutin présidentiel en République démocratique du Congo (RDC). Cela, au risque de rendre inconfortable la position du candidat-président Joseph Kabila qui se dit réélu face à l'opposant Etienne Tshisekedi. Après un travail remarquable et fort minutieux, l'Union européenne (UE), vient à son tour d'enfoncer le clou. Selon elle en effet, le dernier scrutin présidentiel en RDC a été marqué par le manque de transparence et les irrégularités dans la collecte, la compilation et la publication des résultats. Le rapport de la mission d'observation de l'Union européenne se veut très critique sur ces élections et sur leur crédibilité.

En particulier, le rapport de l'UE qui vise principalement le travail des centres de compilation des résultats note « qu'en contradiction avec la loi électorale, le bureau de la CENI a demandé à plusieurs centres de compilation de ne pas afficher immédiatement les résultats de compilation mais de les envoyer d'abord au siège de la CENI pour un " contrôle de cohérence " ». Le document ajoute des éléments au rapport émis samedi dernier par le Centre Carter. Par ailleurs, Madnodje Mounoubaï, porte-parole de la Mission des Nations unies en RDC (la Monusco), relève aussi « des anomalies dans le décompte ». Les observateurs européens ont été les témoins de cette entorse à la loi à Mbandaka, Goma, Kinshasa, Kisangani, Lubumbashi. Le rapport dénonce aussi le fait d'avoir refusé l'accès au centre national de traitement des résultats par les témoins de partis politiques et les observateurs. Enfin, il note que « plusieurs résultats de bureaux de vote rendus publics le soir du dépouillement et observés par les équipes sur le terrain, notamment à Lubumbashi, ne correspondent pas avec ceux publiés par la CENI ».

Les Africains ont longtemps attendu des observateurs internationaux ce type de remarques pertinentes à propos des consultations électorales qui émaillent l'histoire du continent. Des années durant, la langue de bois, les fuites en avant, ont caractérisé le travail qu'on disait effectué sur le terrain par des gens compétents et crédibles. Presque jamais pourtant, il n'avait reflété les réalités peintes par les opposants. Il semble bien que de plus en plus, la donne soit appelée à changer. Sans doute, demain ne sera-t-il pas la veille du côté de l'Union africaine (UA) qui peine à tourner la page. L'UA qui avait dépêché trente observateurs en RDC, les a fait rentrer précipitamment et discrètement avant le dépouillement. L'UA qui a beaucoup perdu de sa crédibilité, a donc, une nouvelle fois, raté l'occasion de se réconcilier avec les citoyens de ce continent. Véhémentes ou pas, les critiques formulées jusque-là, renvoient au cliché du « médecin après la mort ». Suffira-t-il, en effet, pour préserver la paix, que l'opposition rentre dans les rangs et continue de respecter la voie républicaine de contestation des résultats en usant des recours légaux ? Certes, un tel geste est un gage de sérieux autant que de sérénité.

Dans leur immense majorité, les Africains, les Congolais en particulier, voudraient bien y croire. Mais, une fois les critiques des observateurs formulées et les recours des opposants épuisés, qu'adviendra-t-il de la RDC ? En viendra-t-on jusqu'à annuler les résultats de cette présidentielle historique ? Qui réussira à empêcher le fils Kabila de rempiler ? Il ne faut pas rêver ! Reste que si l'actuel chef de l'Etat s'entête, et tente de se maintenir sans égard pour les critiques, cet autre mandat ne sera pas une partie de plaisir. On peut féliciter l'Eglise catholique, le centre Carter et l'Union européenne d'avoir mis les bouchées doubles dans l'observation de ce scrutin à nul autre pareil. Mais que peut-on attendre des élites congolaises, les magistrats en particulier ? Sauront-ils s'élever au-dessus du débat pour éviter à ce pays meurtri, d'autres années de guerre fratricide ? Et le président Joseph Kabila lui-même ? Jouera-t-il à l'innocent et à l'indifférent ? Acceptera-t-il de dialoguer avec ses adversaires politiques pour trouver une issue heureuse à ces sempiternels tiraillements ? Le deuxième scénario nous apparaît plus pertinent. Il préserverait à coup sûr la RDC de ces règnes tyranniques ou de ces aventures qui ne font que la tirer vers l'arrière.

Dans cette optique, Kabila fils devra se garder de certaines prises de position. Par exemple, Lambert Mende, porte-parole du gouvernement, trouve que le rapport de l'UE « soulève un certain nombre de problèmes dont nous sommes parfaitement au courant. Mais ces erreurs ne sont nullement de nature à remettre en cause le classement tel qu'il a été annoncé par la Commission électorale ». De telles sorties ne peuvent que susciter des inquiétudes. En effet, elles traduisent l'existence d'un scénario susceptible de plonger à nouveau ce vaste pays de la grande forêt équatoriale dans la détresse. Incontestablement, la RDC est sous tension. Il faut éviter que le calme précaire qui y prévaut, ne se mue soudainement en une véritable tempête après la proclamation des résultats par les pouvoirs constitutionnels à Kinshasa. Qui donc sauvera ce pays ? La Justice nationale ou la communauté internationale ?

L'Union africaine (UA), à la langue de bois et dont les observateurs vident les lieux sans crier gare ? L'Occident aux multiples retournements de vestes ? Comment ? En se décidant à larguer définitivement celui qui, jusque-là, a défendu tant bien que mal ses nombreux intérêts ? Une chose est sûre, le dernier mot appartient aux Congolais eux-mêmes. Ils doivent se montrer capables de tirer les leçons du passé

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