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samedi 29 mars 2014

justice arbitraire, procès truqué et tronqué et un arrêt nocturne













La condamnation de l’opposant Diomi par la Cour suprême de justice mercredi a suscité diverses réactions au sein du Parlement. L’opposition accuse la justice d’être à la solde du pouvoir. Réactions.

Pour le député national Martin Fayulu des Forces acquises à l’opposition, la condamnation d’Eugène Diomi Ndongala est une nouvelle preuve que la justice est au service du pouvoir politique. « La levée d’immunité a été faite avec toute la légèreté du monde parce que c’était commandité, explique l’opposant. Et d’ajouter: « Nous trouvons ce comportement totalement inacceptable. Nous allons demander aux avocats de Diomi de saisir la cour de Cassation. La procédure n’a pas été respectée et donc le jugement est nul et non avenu. Sur le plan politique, nous allons aller voir le président de l’Assemblée nationale pour qu’il tire toutes les conséquences. Nous évoquerons aussi des démarches à suivre afin de  procéder à la réparation.»

 

Même son de cloche pour Jean-Claude Vwemba, député du Mouvement du peuple congolais pour la République. L’homme proclame haut et fort sa frustration. « C’est une frustration parce qu’on ne peut pas se servir de la justice pour sanctionner ses adversaires politiques. Comme vous le savez, explique le député,  pendant le procès, les deux demoiselles supposément violées par l’honorable Diomi se sont confondues en excuses d’une manière incroyable. C’est la preuve que ce sont des condamnations politiques. Nous ne pouvons pas l’accepter. La justice est entre les mains des autorités politiques de ce pays






L’Arrêt de la Cour Suprême de Justice condamnant Eugène Diomi Ndongala, député national déchu et ministre honoraire, à dix ans de prison ferme, n’a nullement surpris tous ceux qui suivaient le dossier. A partir du huis clos décrété par cette haute cour pour empêcher la presse et le public d’assister à un procès des mœurs dont tous les détails ainsi que les identités du présumé auteur du double viol et des présumées mineures violées étaient sur la place publique, le sort du prévenu était scellé. C’était clair dès lors que ses avocats, mécontents du refus des juges d’examiner l’exception relative à la filiation controversée des victimes, s’étaient retirés de la barre. La sévérité du réquisitoire du ministère public – 28 ans de prison- était fort révélateur de ce qui attendait Diomi.

Il s’avère malheureusement qu’après le verdict, l’affaire Diomi laisse le goût d’une flagrante injustice à l’égard de l’accusé. Le non respect de plusieurs éléments de la procédure a conforté les observateurs dans la persistance d’une justice à deux vitesses en République Démocratique du Congo.

Pourtant, l’opinion publique avait grandement besoin de connaître la vérité dans les faits mis à charge de cette personnalité politique, dont la famille biologique figure dans les annales de l’histoire nationale, au crépuscule de la colonisation belge comme lors des deux premières République. Fils de Gaston Diomi, un des pères de l’indépendance, Eugène Diomi avait la dignité de tout un clan à défendre. D’où, il était nécessaire que l’accusation dépose, devant la barre, toutes les preuves de sa culpabilité.

Cela n’ayant pas été fait, le doute va continuer à envelopper à jamais un procès au goût d’inachevé. Qui va croire que Diomi a réellement commis un double viol, tant que l’on aura pas clarifié les relations de filiation entre les deux vraies-fausses sœurs prétendues victimes et leur vrai-faux père ? Qui va apaiser tous ceux qui attendent des réponses sur les dates de naissance controversées des deux filles, dont l’espacement des maternités est inférieur à six mois ? Qui va éclairer tous ceux qui doutent du lieu du délit, dès lors qu’une fille prétend qu’elle et sa sœur avaient été violées du côté de Huileries, au siège de la Démocratie Chrétienne, alors que sa permanence se trouve à Gombe, tandis que l’autre affirme qu’elles avaient répondu au rendez-vous de Diomi à sa propre résidence, à Ma Campagne.

Qui est réellement le monsieur qui se fait passer pour le père des victimes, d’autant que les rumeurs en circulation à son sujet le donnaient pour un opportuniste recruté pour les besoins de la cause ? En tous les cas, son comportement a paru fort suspect. En principe, un respectable père aurait eu pour premier réflexe de protéger l’anonymat de ses deux filles, mineures d’âge et partant futures candidate potentielles au mariage et à une vie professionnelle normale. Que non… ! Notre papa avait pris un malin plaisir à s’exhiber, aux côtés de ses filles, sur des chaînes de télévision, en vue de faire accréditer la thèse du viol. En affirmant haut et fort que les « services » rendus à Diomi étaient monnayés et qu’il avait abusé d’elles plusieurs fois, a-t-il pensé aux retombées négatives de son scénario, qui a plus fait passer lesdites filles non pas pour des victimes d’un viol mais des professionnelles du sexe ?

Ce sont toutes ses zones d’ombres que la Cour Suprême de Justice aurait dû éclairer. Il est fort dommage que cette juridiction n’ait pas réussi à évacuer tous les doutes qui planaient sur les prétendues relations sexuelles entre Diomi et ses « objets » de jouissance. Tout au long du procès, aucune démonstration de la flagrance des faits n’a été faite, ce qui fait penser que le précité a été condamné sur la base des présomptions, non étayées par des pièces à conviction, des témoignages ou des aveux.

Un roman policier à la congolaise

Pendant presque deux ans, de juin 2012 à mars 2014, la scène politique congolaise a été dominée par le feuilleton de l’affaire Diomi, marquée par des rebondissements à répétition. Lorsqu’en juin 2012, l’opinion tant nationale qu’internationale apprend qu’Eugène Diomi Ndongala, homme politique bien connu de la place de Kinshasa, ministre honoraire et député national élu, a échappé à une arrestation policière, au motif qu’il aurait violé deux filles mineures, c’est l’étonnement, mêlé de doute. Pour convaincre, la police du district de la Lukunga, qui a perquisitionné son présumé « abattoir » de l’avenue Colonel Ebeya, au restaurant-hôtel Green Garden, fait passer sur plusieurs chaînes de télévision les objets du délit : lit, matelas, préservatifs, produits aphrodisiaques, parfums, savons de toilettes, etc.

Cinglant démenti de l’incriminé, par le biais de son parti, la Démocratie Chrétienne, qui soutient qu’il s’agit d’un montage grossier car Diomi était rentré chez lui en début de soirée, après avoir présidé, devant témoins, une réunion préparatoire à la première sortie publique de la MPP (Majorité Présidentielle Populaire), en sa qualité de Coordonnateur de cette nouvelle plate-forme politique attachée à la vérité des urnes, à savoir la victoire d’Etienne Tshisekedi comme président élu de la RDC en novembre 2011.

Une semaine après, la même police de la Lukunga fait état de l’arrestation de Diomi, pour besoin d’enquête, mais sa famille biologique parle de son enlèvement par les « services ». La confusion s’amplifie par la suite, lorsque les sources policières parlent de l’évasion de l’intéressé, alors que sa famille biologique et son parti crient à la ronde qu’il a été enlevé et détenu au secret dans les cachots des services spéciaux. Ainsi, pendant plus de trois mois, Diomi ne fait pas signe de vie. Entre-temps, le Procureur général de la République a introduit, auprès du Bureau de l’Assemblée Nationale, une requête sollicitant l’invalidation de son mandat et la levée de son immunité parlementaire, en vue du déclenchement des poursuites judiciaires à sa charge.

Mais, à deux jours de l’ouverture du sommet de la Francophonie à Kinshasa, Eugène Diomi réapparait brusquement. Sa famille et son parti racontent qu’on l’a retrouvé abandonné sur la route du Bas-Congo, malade et terriblement affaibli…la barbe hirsute. Des sources policières et judiciaires relèvent, pour leur part, que l’incriminé est sorti de lui-même de sa cachette, après trois mois de cavale, en vue d’attirer sur lui l’attention des participants à la rencontre mondiale de l’espace francophone.

Alors que l’on croit l’affaire close, son dossier rebondit à la session parlementaire de septembre. Malade et opéré à l’Hôpital de l’Amitié de Ndjili, à en croire sa famille et ses avocats, Eugène Diomi fait savoir au Bureau de l’Assemblée Nationale qu’il n’est pas, physiquement, en mesure de répondre à son invitation en vue de présenter ses moyens de défense. Au finish, il est déchu de son mandat de député. Et le temps passe, sans que l’on sache si le Parquet général de la République va effectivement passer à l’action ou classer le dossier sans suite. La réponse ne tarde pas à venir. Au mois d’avril 2013, Diomi est de nouveau mis aux arrêts, entendu au Parquet général de la République puis placé en détention préventive à la Prison Centrale de Makala.

En dépit de ses ennuis de sa santé et d’un Arrêt de la Cour Suprême de Justice l’assignant à résidence, il est maintenu à « l’Université de Makala », jusqu’à ce jour. Pour avoir déjà passé près d’une année en prison, il lui reste encore 9 années à purger, en compagnie d’un autre célèbre détenu d’opinion, le pasteur Kutino Fernando. Condamné lui aussi à dix ans, il en est présentement à sa huitième année à Makala.



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