Referendum, révision constitutionnelle, loi électorale : le Congolais «BMW» efface le tableau
Après le 04 janvier 1959 et le 16 février 1992, le peuple congolais vient d’écrire une nouvelle page de son histoire durant les journées du 19, 20, 21, 22 et 23 janvier 2015. Comme il y a 56 ans et 23 ans, le sang a encore coulé pour obtenir des hommes au pouvoir la libération de l’espace politique. Cette nouvelle page d’histoire, ayant pour enjeu majeur le refus du souverain primaire de cautionner un énième tripatouillage de la Constitution, a dû s’écrire en termes de morts, blessés, arrestations et pillages en raison de l’entêtement des « faucons » de la Majorité présidentielle d’opérer coûte que coûte un passage en force.
Les architectes de la tentative de contournement de la loi fondamentale et partant du glissement du mandat présidentiel comptaient sur la caricature légendaire du Congolais « BMW » (Beer, Money, Woman) esclave de la bière, de l’argent et du sexe pour réaliser en douceur leur « coup d’Etat constitutionnel ». Convaincus que la RDCongo n’était pas le Burkina Faso, ils pensaient que les manifestations de colère déclenchées pas les masses populaires à Kinshasa, au matin du lundi 19 janvier 2015, allaient s’arrêter dans le périmètre du Palais du Peuple.
Ils croyaient qu’après avoir laissé s’époumoner et s’essouffler l’Opposition parlementaire avec ses sifflets et chants le lundi 12 janvier 2015 dans la salle des Congrès du Palais du Peuple, les manifestants des rues de la capitale allaient, eux aussi, capituler au bout d’une journée de « combat ». Erreur ! L’onde de choc a non seulement gagné tout Kinshasa mais aussi embrasé les principales villes des provinces de la République. La RDC a failli se transformer en « copie collée » du Burkina Faso, n’eut été la sagesse des Sénateurs et de leur président, Léon Kengo wa Dondo, qui ont su lire à temps les signaux de ce que voulait réellement le souverain primaire, véritable détenteur du pouvoir.
Pour avoir méprisé l’opinion interne plusieurs mois durant, la Majorité présidentielle s’est compliquée les bidons pour les mois et semaines à venir, car le Congolais « BMW » ne rêve désormais plus que d’une chose : la fin des mandats des animateurs actuels des institutions de la République et le renouvellement du personnel politique, à travers les urnes, dans les délais constitutionnels. Depuis le 23 janvier 2015, plus aucun décideur politique ne reconnaît avoir soutenu la thèse du référendum, de la révision constitutionnelle ou de la loi électorale.
L’image du Congolais distrait, naïf, peureux, analphabète, affamé, mendiant… à qui il suffisait d’offrir une bière, une brochette de viande avariée, un polo, un pagne, un bol de sel, un savon, un stylo, un cahier, un bonbon, un biscuit… pour être élu, a été démentie par les événements de la semaine dernière. Tous ceux qui voyaient dans le Congolais « BMW » le prototype du parfait « mouton de Panurge », prêt à s’aligner à la position du plus offrant, savent à présent qu’il a une forte capacité de lecture des enjeux politiques d’hier et d’aujourd’hui.
Et demain ?
Demain, les « héros » des journées folles du 19, 20, 21, 22 et 23 janvier 2015 attendent impatiemment d’être conduits aux urnes par la CENI (Commission Electorale Nationale Indépendante), afin qu’ils puissent traduire dans les urnes leur volonté de changement ou non de gouvernance. La leçon à tirer de l’implosion sociale de la semaine dernière est que ceux qui ont la responsabilité de gérer le processus électoral évitent de commettre l’erreur de chercher encore à gagner du temps ou à tripatouiller les textes appelés à donner au peuple congolais des élections réellement libres, démocratiques et transparentes.
Le pari à gagner par les décideurs politiques actuels est de ne plus chercher à énerver ce Congolais « BMW » qui a décidé de s’approprier le processus électoral et de se choisir, dans les délais légaux et selon des règles du jeu clairement définies, les futurs animateurs des institutions de la République. Le vent de la libération de la démocratie des griffes de ceux qui tenaient à la privatiser pour une durée indéterminée souffle tellement fort qu’il serait difficile de l’arrêter.
Kimp