Mercredi, 28 Mars 2012 14:39
« Nous n'allons quand même pas aller serrer la main de Kabila », soutient la NVA, parti qui passe actuellement pour le plus populaire en Belgique et qui exhorte le ministre des Affaires étrangères à ne pas franchir ce pas.
Les personnalités politiques belges Bart de Wever et Karl Vanlouwe ont signé un texte dans le journal néerlandophone “ De Morgen“ dans lequel ils critiquent la visite en RD-Congo du ministre belge des Affaires étrangères Didier Reynders. Ils lui reprochent notamment son manque de vision et le fait qu'il ne tienne pas compte du climat politique tendu en RDC. Les deux signataires lui conseillent d'ailleurs de ne pas serrer la main de Joseph Kabila“. Le titre donné à cet article est du Journal La Tempête des tropiques.
(Par Bart De Wever et Karl Vanlouwe - Tiré de De Morgen - 26/02/2012)
La visite de M. Didier Reynders, au Congo donne un mauvais signal. C'est ce que disent Bart De Wever, président de la N-VA, et Karl Vanlouwe, président de la commission des relations étrangères du Sénat.
Récemment l'Organisation des Nations Unies a publié un rapport sensationnel. Selon les Nations Unies, les forces de sécurité congolaises se sont rendues coupables de graves violations des droits de l'homme, lors des élections de novembre dernier, y compris de meurtre et de torture. En outre, il y a 265 personnes qui attendent en prison sans jugement.
Au Cabinet des Affaires étrangères, dans la rue des Carmes, on reste silencieux comme l'année dernière au moment ou le président sortant Joseph Kabila a modifié la constitution pour assurer sa réélection. Même avant le dévoilement des chiffres officiels une réunion avec le ministre congolais des Affaires étrangères avait déjà eu lieu à Val Duchesse, loin des Affaires étrangères et du quartier Matonge, tout près de là.
Les rapports sur les élections faits par l'Institut Carter et l'Union européenne étaient pourtant clairs. Dans certains districts, le taux de participation était de 100%, avec 99,9 % de vote pour le président sortant. Faut le faire. On pouvait à peine parler d'une compétition électorale loyale. C'était pourtant là la condition principale mise avant l'élection par notre pays au soutien financier -16,5 millions - pour les élections.
L'annonce officielle de la visite de Reynders a eu lieu il y a quelques semaines.
Notre ambassadeur à Kinshasa a souligné “l'excellente coopération entre la Belgique et le Congo, deux pays qui actuellement se trouvent dans une phase de dialogue permanent et constructif”. Le passage cité ci-déssus est symptomatique d'une absence totale de vision face au Congo. Sous le gouvernement arc-en-ciel, les liens avec le gouvernement de Kinshasa ont été consolidés. Le ministre des Affaires étrangères, alors Louis Michel, a donné la priorité absolue au Congo, mais les fréquentes visites n'ont- pas motivé Kabila, père et fils, à oeuvrer pour la démocratie ou le développement économique et social. Le niveau de vie du peuple congolais demeure l'un des plus bas au monde jusqu'à ce jour.
Une vision stratégique
Le passage de Karel De Gucht, lui qui a eu le courage d'exprimer des critiques face au pouvoir à Kinshasa, a été sensationnel dans les salons diplomatiques. Mais il en résultait simplement une politique parallèle dans laquelle les anciens ministres André Flahaut et Armand De Decker maintenaient les contacts de haut niveau. De Gucht était à peine parti à la Commission Européenne, que le gouvernement acceptait la présence du Roi Albert à la cérémonie des 50 ans d'indépendance. Kabila ne pouvait imaginer un meilleur point de départ pour sa campagne un an plus tard.
Aujourd'hui, nos relations avec Kinshasa sont déterminées par la culpabilité historique, mais avant tout par des intérêts individuels, en particulier du côté francophone. Ce voyage-ci s'inscrit aussi dans le soutien aux intérêts économiques.
Personne ne conteste la nécessité de la diplomatie économique, en particulier en des temps difficiles. Mais ce ne doit pas être une justification pour légitimer un régime qui à travers des élections frauduleuses tente de rester au pouvoir. Et c'est ce qui arrivera. Notre ministre des Affaires étrangères est le premier ministre européen qui s'est rendu à Kinshasa.
Evidemment, ceci renforcera la position de Kabila sur la scène internationale, contre la volonté des Congolais.
On ne peut pas attendre de notre diplomatie qu'elle intervienne partout. Les priorités doivent être analysées.
Au Congo, cependant, nous avons encore une influence. Il est donc surtouts, regrettable que nous l'utilisons pour légitimer Kabila. Elle est aussi peu constructive face à une politique européenne commune. La lettre de félicitations de M. Di Rupo adressée à Kabila, avant que le résultat soit connu de façon certaine, était déjà difficile à admettre. Sous la pression de l'Europe on a pu éviter qu'un membre de notre gouvernement n'assiste à la prestation de serment de Kabila. Aujourd'hui nous nous isolons de nouveau. Le commissaire européen pour l'aide humanitaire, Kristalina Georgieva, a clairement une vision différente. Dans “De Standaard“ elle déclarait sans scrupules que, l'Etat congolais abandonne ses citoyens.
Nous appelons en premier lieu, le ministre des Affaires étrangères à développer une vision stratégique sur la politique du Congo, en consultation avec le parlement fédéral, les régions fédérées et la société civile. La diplomatie actuelle en ces matières crée la confusion. Mais ceux qui sont au pouvoir à Kinshasa doivent savoir que nous mettons des conditions à notre soutien, qui équivaut toujours à un montant annuel d'environ 120 millions d'euros.
Des conditions qui concernent le progrès et le développement démocratique, le respect des droits de l'homme, la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption. Toutes conditions que le Congo ne remplit pas du tout. Dès aujourd'hui, Reynders pourrait déjà faire un geste, notamment de ne pas serrer la main du chef d'Etat