Début août, “CONGONEWS” prévenait, dans une analyse très pointilleuse sur l’intention de Joseph Kabila de prolonger son mandat par une voie autre que la révision de la Constitution. Entre autres hypothèses avancées, il y avait le prétexte à prendre comme quoi qu’il faille attendre les conclusions du recensement de la population pour obtenir un materiau susceptible de garantir des élections transparentes. Comme le recensement ne donnera ses résultats qu’en 2015, la RD-Congo est partie pour un report de toutes les échéances électorales, présidentielle et législatives de 2016 comprises. Ce qui n’était qu’une prospective est entrain de se matérialiser dangereusement aujourd’hui au niveau de la Commission Gouvernance, réformes institutionnelles et démocratie des Concertations nationales. Selon les premières conclusions de cette commission présentées à sa plénière, il a été établi que le recensement est le seul gage pour des élections crédibles. En conséquence: pas d’élection à organiser avant la conclusion de cette opération. Le paradoxal est que la proposition est venue de la délégation de l’opposition valablement représentée par le MLC Germain Kambinga Katomba et Gérard Kamanda wa Kamanda. Comme si elle avait été circonvenue pour faire le sale boulot à la place de la majorité, question de crédibiliser la démarche. Reste à soumettre la proposition à la grande plénière des concertations qui ne fera qu’avaliser comme elle l’a fait de manière éhontée à propos du règlement intérieur adopté par plébiscite sans la moindre discussion, façon démocratie à la soviétique. (Lire ci-dessous la prospective de “CONGONEWS début août 2013)
L’agenda caché de Joseph Kabila pour 2016 a été percé à partir de certaines chancelleries, notamment à l’ambassade US. Il tient, sel¬on des recoupements d’une précision mathématique, à un schéma à faire passer aux Concertations nationales qui consiste à obtenir que son second mandat ne com¬mence à courrir qu’à l’issue des prochaines négociations. De la sorte, l’éventualité à hauts risques d’une révision constitutionnelle se trouve contournée au profit d’un compromis politique suscep¬tible de maintenir Kabila au pouvoir jusqu’en 2018. Com¬promis politique qui verra sa légitimation tirée dans la guerre du M-23, déclarée quatre mois après l’investiture du “Président réélu” avec la conséquence que la situation de belligérance a empêché à Joseph Kabila d’exercer la plénitude de la fonction prési¬dentielle. Puisque la caution de l’opposition ou d’une cer¬taine opposition est néces¬saire pour crédibiliser la dé¬marche, l’intriguant patenté Léon Kengo wa Dondo a été mis à contribution. Un pacte a été passé avec lui pour qu’il se charge d’amener des op¬posants -en tout cas, ceux qui le voudront bien- à faire le jeu pour aboutir à la con¬stitution d’une “Nouvelle ma¬jorité présidentielle” -NMP. En contre-partie, promesse lui a été faite de prendre, grâce à la majorité à constituer, la place d’Augustin Matata Ponyo, à l’Hôtel du gouverne¬ment, sur l’avenue ex-Trois Z. Ce qui paraissait paradoxal à considérer la position de ses hommes, notamment le se¬crétaire exécutif de son parti UFC, Michel Bongongo et son gendre, en même temps son missi dominici, Franck Apenela, signataires tous les deux de la déclaration finale du Conclave de l’opposition, réuni en juillet dernier, à la 15ème rue Limete industriel. En réalité, il n’y a aucun paradoxe pour quiconque sait que Kengo a laissé faire les opposants dans le but de faire chanter Joseph Kabila. Il n’avait pas été d’accord que l’ordonnance de convocation des Concertations nationales ne reflète pas ce qui avait été convenu dans le plus grand secret lorsque Kabila a passé deux heures, entre quatre yeux, avec lui, à sa résidence, au croisement Batetela et de la Gombe, attenante au cabinet du ministre des Affaires foncières. Il a alors pris son avion pour la Suisse à la veille même de la convocation du Conclave, quitte à laisser la voie libre au triomphe de la thèse pro-Kamerhe favorable à ce que le Chef de l’Etat reconsidère son ordonnance. Au finish, l’homme de la troisième voie qui l’avait conduit à la Prima¬ture, en 1994, avec l’appui d’alors président du bureau du HCR-PT, le Parlement sui generis issu de la Conférence nationale pro-démocratie, Mgr Laurent Monsengwo et au détriment d’Etienne Tshisekedi, a capitalisé. Des émissaires du régime, au plus haut niveau, ont dû faire le déplacement de Montreux, en Suisse, pour aller discuter avec lui.
La nouvelle offre proposée en terre helvétique ouvre la voie pour règler à travers le Réglement intérieur des Concertations nationales, ce qui ne l’a pas été dans l’ordonnance présidentielle. Aquièscement de la part de Kengo qui a procédé, le 6 août, avec Aubin Minaku à la mise en place du Secrétariat technique des Concertations nationales, sitôt revenu au pays quarante-huit heures auparavant. Preuve, si besoin en était encore, qu’il ne se sent pas lié par les préalables avancés par ses pairs opposants conclavistes. En toile de fond, le plan Kabila-Kengo repose sur la quasi incertitude -délibérée ou fortuite- d’organiser la présidentielle combinée aux législatives en 2016. Il s’agit d’une conclusion à laquelle sont parvenus les stratèges du régime après avoir constaté que la RD-Congo ne pourra pas organiser cinq échéances électorales majeures (provinciales, sénatoriales, lo¬cales-municipales-urbaines, législatives et présidentielle) d’ici le délai-butoir du 19 décembre 2016.
Le moment venu, il reviendra à l’abbé Apollinaire Malumalu d’en donner la justification vis-à-vis de la communauté internationale si regardante sur le respect du calendrier électoral.
En appui à ce subterfuge, il y a le recensement général de la population qui ne livrera ses résultats qu’en 2015. L’argument -déjà imaginé pour le besoin de la cause- est d’alléguer qu’il vaut mieux attendre que le recensement fournisse des données fi¬ables pour organiser les prochaines élections avec plus d’exactitude.
Pas mal joué d’avoir laissé les Congolais fantasmer sur un éventuel troisième mandat via une modification constitutionnelle avec un Boshab qui a poussé le bouchon jusqu’au bout sans se rendre compte que le “Chef” l’a amené à sa mort politique, pas mal donc pendant qu’un autre schéma plus pernicieux mais indolore se tramait dramatiquement en douce, derrière les rideaux à la manière d’une pièce de théâtre écrite par un excel¬lent dramaturge. Du génie digne d’un orfèvre non! Mais au service du mal et avec, à la clé, de très gros risques d’un embrasement général.
(In “CONGONEWS” n°578 du jeudi 8 août 2013)
H.M. MUKEBAYI NKOSO