Le chef militaire du M23, le général Sultani Makenga, a confirmé à l'AFP que ses hommes partiraient samedi de Goma.
Les rebelles congolais du M23 ont quitté samedi comme promis Goma, la capitale de la riche province minière du Nord-Kivu, dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC), qu'ils avaient prise le 20 novembre à l'armée régulière du pays dans une démonstration de force.
Le retrait des rebelles intervient après dix jours de forte mobilisation internationale -- du Conseil de sécurité de l'ONU et des Etats-Unis, mais aussi d'une médiation des pays voisins des Grands Lacs, enclenchée pour éviter un nouvel embrasement à grande échelle dans cette région instable d'Afrique.
En une quinzaine d'année, l'est de la RDC, où sévissent de nombreuses milices et rébellions, a déjà été le théâtre de deux guerres régionales, impliquant jusqu'à sept pays africains, dont le Rwanda et l'Ouganda, qui cette fois encore sont accusés, malgré leurs démentis, de soutenir le M23.
Samedi, un convoi d'une quinzaine de véhicules transportant des centaines d'hommes du M23 et leur matériel militaire ont quitté Goma pour prendre la direction des positions que la rébellion occupait plus au nord, dans le territoire du Rutshuru, avant d'avancer sur Goma et ses environs.
Un peu plus tôt, les rebelles avaient quitté le bâtiment de la Banque centrale à Goma et le poste-frontière de la Grande barrière séparant la ville du Rwanda, où des policiers de RDC, qui font partie d'un contingent arrivé vendredi pour sécuriser Goma après le départ des rebelles, ont déjà pris le relais.
Geoffrey Muheesi, un membre ougandais d'un mécanisme de vérification régional, chargé notamment d'observer le retrait de la rébellion, s'est dit samedi "totalement satisfait" du déroulement de l'opération, qui devrait selon lui s'achever dans la soirée. "Ils se retirent complètement," a-t-il assuré. Vendredi, des centaines de soldats du M23 avaient déjà quitté la ville de Sake, à une trentaine de kilomètres à l'ouest de Goma, et ses environs.
La rébellion du M23 a accepté cette semaine de se retirer des zones fraîchement conquises en échange de l'ouverture de négociations avec le président de RDC, Joseph Kabila.
Le M23, est composé d'ex-rebelles essentiellement tutsi congolais, qui avaient été intégrés à l'armée de RDC en 2009 à l'issue d'un accord de paix avec Kinshasa. Ils se sont mutinés il y a environ huit mois, estimant que le gouvernement n'a jamais pleinement respecté ses engagements.
Les mutins refusent notamment toute mutation hors de leur région du Kivu afin, disent-ils, de protéger leurs familles et les membres de leur communauté qu'ils estiment en danger. Depuis leur marche sur Goma, leurs revendications se sont élargies sur le plan politique, allant jusqu'à remettre en question la légitimité du président Kabila.
Le retrait des rebelles de la capitale du Nord-Kivu, une province stratégique, au coeur d'une guerre aussi économique en raison de ses riches réserves en coltan, cassitérite et or, allège peut-être pour un temps, disent certains analystes, la pression sur le pouvoir de Kinshasa.
Mais les négociations qui vont s'ouvrir s'annoncent tout de même délicates pour Joseph Kabila, de l'avis de beaucoup très affaibli.
Cette semaine, le chef politique de la rébellion, Jean-Marie Runiga, a laissé entendre que l'administration de Goma resterait, au moins en partie, aux mains du M23. Aux termes de la médiation des Grands Lacs, le M23 va même pouvoir poster une centaine d'hommes à l'aéroport de Goma, qui sera ainsi contrôlé par une force multipartite composée de la mission de l'ONU en RDC (Monusco), l'armée congolaise et un contingent tanzanien déployé comme force neutre.
A mesure que s'opère le retrait des rebelles de Goma, les langues se délient parmi la population, qui multiplie les accusation de pillage contre le M23. Ces pillages auraient, selon plusieurs sources, visé essentiellement des biens et des bâtiments publics.
Le convoi du M23 quittant Goma samedi comportait notamment trois camions donnés par l'Union européenne à l'Office des routes de RDC, chargé de l'entretien de la voirie, selon un journaliste de l'AFP.
"Nous sommes contents qu'ils s'en aille, ils nous ont fait souffrir," a déclaré au passage des rebelles devant l'aéroport Parfait, jeune homme de 25 ans. "Comme vous pouvez voir ils ont volé tellement de chose: des véhicules, des munitions, tout."
"Même les voitures avec lesquelles ils partent sont à nous!", a renchéri un autre habitant de Goma au passage du convoi.
"Les voleurs s'en vont," a de son côté lâché un troisième résident, assistant au départ des rebelles de la Banque centrale.
Selon le représentant de l'UE à Kinshasa, Jean-Michel Dumont, d'autres projets financés par l'UE ont été pillés, notamment l'assemblée provinciale pour laquelle l'UE avait fourni ordinateurs et équipements de bureau, et un poste de police.