Les noms de 432 députés sont désormais connus. Mais l’on doit encore retenir son souffle tant que tous les résultats ne sont pas encore publiés. Il n’empêche cependant aux partis politiques, aux plates-formes de se livrer à des manœuvres et de petits calculs sur la constitution de la future majorité parlementaire. Comme il faut s’y attendre, la course à la Primature est déjà ouverte.
Il est vrai que les rideaux ne sont pas encore tombés sur les législatives 2011. La Commission électorale nationale indépendante, CENI, vient de publier les résultats des législatives de 156 circonscriptions électorales pour 432 députés. Excepté ceux de sept circonscriptions électorales annulés pour causes de violence et irrégularités avérées : Kiri (Bandundu), Ikela (Equateur), Punia (Maniema), Masisi (Nord – Kivu), Nkole et Lomela (Kasaï Oriental) et Demba (Kasaï Occidental). Cela après plusieurs reports, entretenant ainsi le suspense et suscitant de nombreuses interrogations sur la crédibilité et la fiabilité du scrutin.
Qu’à cela ne tienne. La «machine politique» continue à tourner au rythme du realpolitik congolais. Les «stratèges» de différentes officines politiques vont déjà se mettre à pied d’œuvre pour s’adonner à de grandes manœuvres politiques, saines ou malsaines, appuyées par de petits calculs sur la constitution de la future majorité parlementaire. Et au bout du tunnel, la nomination du Premier ministre, chef du prochain gouvernement.
Serait-ce prématuré de se lancer dans cet exercice ? Une interrogation difficile tant il est vrai que ce serait mal connaître «la logique politique congolaise». On a souvent tendance à «précipiter» les choses. C’est dans ce contexte qu’il faudra désormais se résoudre à admettre que la course vers la primature est déjà enclenchée.
NI LE PPRD NI L’UDPS N’ONT LA MAJORITE
Cette précipitation pourrait aussi s’expliquer par ce fait qu’aux termes des élections 2011, les partenaires extérieurs ont une autre vision de la chose politique. Ils estiment que de toutes les institutions de la République démocratique du Congo, ils accorderont plus d’attention et d’importance au travail qui sera exécuté au niveau de l’Assemblée nationale et du gouvernement. Seules ces deux institutions, à leurs yeux, pourraient donner une nouvelle impulsion, une nouvelle dynamique à l’action globale de l’Etat. Voilà pourquoi ils attendent, avec beaucoup d’impatience, les résultats des législatives.
Mais quelles sont les premières tendances après la publication des résultats provisoires des législatives ? Au premier regard, il se dégage nettement qu’aucun parti politique ne dispose, à lui seul, de la majorité de sièges. Aussi, selon les premières tendances, aucune de grandes formations politiques qui ont pignon sur rue ne dispose du nombre de députés exigés par le législateur pour constituer la majorité parlementaire. Ni le PPRD, ni l’UDPS n’ont eu cette chance. Moins encore le PPPD, le MLC, le PALU, le MSR, l’UNC, l’UFC, l’ARC… pour ne citer que ces partis à dimension nationale et à impact visible sur le terrain.
DES ALLIANCES
Il revient donc à dire que c’est autour des alliances que tout va se jouer. Si l’on s’appuie sur la stratégie mise en place pendant la période préélectorale, la balance se penche du côté de la Mouvance présidentielle. Elle dispose d’une bonne brochette de partenaires et alliés qui, avec le concours des circonstances, pourrait disposer de cette majorité parlementaire qui fait courir tout le monde politique. A ce titre, la Mouvance présidentielle aura ce privilège de compter dans ses rangs le formateur du futur gouvernement.
L’Opposition aura du mal à constituer cette majorité parlementaire. En nous reportant toujours sur la période préélectorale, cette opposition est plurielle. Elle est ainsi allée en ordre dispersé aux élections. Il y a la tendance de la dynamique Tshisekedi, l’aile Sultani, la dynamique Vital Kamerhe, le courant Kengo wa Dondo. Toutefois, si les intérêts supérieurs de la Nation guidaient les pas de cette Opposition pour qu’elle soit un «véritable contre-pouvoir», des surprises ne seraient que positives au débat national.
Cependant, les tractations ne seront pas du tout faciles au regard du climat délétère d’avant, pendant et après les élections. Au sein de la mouvance présidentielle, il y a eu des frustrations, ensuite des accrochages pendant la campagne électorale et après le vote entre partenaires, alliés d’une même famille politique. D’où, toutes ces contestations et cette initiative de mettre sur pied une cellule susceptible de gérer les contradictions et les frustrations internes à la MP.
Soit. Plusieurs cas de figure sont possibles à la MP pour disposer de cette majorité parlementaire. Des accords peuvent être conclus entre le PPRD-PPPD-ECT-NAD-ADH pour donner à la MP la majorité parlementaire. Ou encore PPRD-PALU-MSR-ARC-ECT-PPPD-NAD-ADH pour le même objectif. Ajouter à cela d’autres formations politiques qui ont vu le jour la veille des élections pour des raisons de stratégies électorales sans oublier les indépendants.
L’on pourrait se permettre le même exercice de probabilité dans l’opposition avec le cas de figure suivant : UDPS-UNC-UFC-MLC-ATD-CDC. A ce stade également, il y a lieu de compter avec les partis politiques qui constituent les plates-formes de l’Opposition, à savoir Soutien Etienne Tshisekedi, Alternative Vital Kamerhe, en plus des indépendants. Mais la donne semble être compliquée d’autant que celle-ci, même si elle pouvait disposer de cette majorité, ne parle pas à l’unisson.
Mais il ne faudra pas se leurrer. Avec cette réalité riche en rebondissements qui caractérise l’environnement politique en RDC où l’éthique et la morale politique demeurent des concepts insaisissables, il ne faudrait pas être surpris que l’on assiste à des élans de transhumance politique, pour ne pas dire de reniement pour les privilèges du pouvoir. C’est-à-dire, le temps des alliances contre nature va bientôt arrivé. Aussi, dans l’hypothèse de la mise en place d’un «gouvernement d’ouverture ou d’union nationale», on pourrait s’attendre aux débauchages. Ce genre de «surprises» se prépare en de périodes analogues.
Au demeurant, tout ceci n’est que virtuel, supputation. Sans exclure des impondérables de la vie politique face à cette crise politique qui n’est pas du tout un mirage.