Elections dans la confusion et le désordre
MFC (avec AFP, AP, Reuters, Belga)
Mis en ligne le 29/11/2011La CENI a autorisé à voter même sans être inscrit sur les listes, en raison du désordre dans celles-ci. Violences au Katanga et au Kasaï : plusieurs morts.Les indépendantistes katangais ont revendiqué, auprès de l’AFP, trois attaques anti-élections survenues au Katanga. Un camp militaire et un dépôt de munitions avaient été attaqués dans la nuit de samedi à dimanche à Lubumbashi par des hommes, parfois en uniforme, au front ceint d’un bandeau rouge. Une attaque de ce type avait déjà été enregistrée en juin dernier.
Lundi à l’aube, un convoi de huit Jeep transportant du matériel électoral a été attaqué à son tour; les policiers de l’escorte ont ouvert le feu, blessant certains des assaillants. Selon des sources katangaises, les Jeep transportaient des bulletins de vote déjà cochés au nom de Joseph Kabila. L’AFP indique de son côté que c’est ce qu’affirment les habitants proches du lieu de l’attaque, qui ont montré des bulletins en faveur du chef de l’Etat sortant.
Peu avant midi, toujours à Lubumbashi, deux bureaux de vote au moins ont été attaqués par des indépendantistes katangais, qui ont invité les électeurs à quitter les lieux. Ils ont tué deux policiers qui tentaient de s’interposer, tandis qu’une électrice était tuée d’une balle perdue.
Le Katanga, province de naissance du défunt Laurent Kabila, est considéré comme acquis à son fils Joseph Kabila mais, l’été dernier, les observateurs avaient été surpris par le gros succès de meetings de l’opposant Etienne Tshisekedi dans les grandes villes.Violences aussi à Kananga, chef-lieu du Kasaï occidental et un des fiefs de Tshisekedi. Selon l’Onu, elles ont éclaté après la découverte d’urnes déjà remplies, alors que les électeurs déploraient déjà l’exclusion de témoins de partis de certains bureaux de vote; le tri des électeurs par un chef de centre de vote; l’absence d’urnes et de bulletins dans certains bureaux. Des émeutes ont éclaté, au cours desquelles de trois à quinze bureaux de vote, selon les sources, ont été incendiés. Selon l’AFP, une observatrice a été grièvement blessée dans l’émeute.
Selon une source de "La Libre Belgique", on a aussi brûlé des bureaux de vote à Demba (Kasaï occidental) parce que les gens ne trouvaient pas leurs noms sur les listes et qu’il n’y avait pas d’isoloirs. L’UDPS a signalé l’absence du nom de Tshisekedi sur les bulletins de vote dans certains bureaux au Kasaï; selon une de nos sources, ces bulletins auraient été remplacés par d’autres, entiers : il s’agissait d’une "erreur de découpe", l’opposant figurant au bas du bulletin.A Kinshasa, le vote semblait avoir bien commencé, à part des retards. La tension a toutefois monté au cours des heures en raison de la désorganisation : manque de bulletins et d’urnes; absence de nombreux noms sur les listes; bureaux de vote déplacés en dernière minute "faute de place"; électeurs renvoyés sans fin d’un bureau de vote à l’autre; absence de bulletins pour la présidentielle dans plusieurs quartiers pauvres de la capitale - où Tshisekedi est populaire - ainsi qu’à Kisangani (Province orientale).
Cela a évidemment accru la méfiance des partisans de l’opposition vis-à-vis du processus électoral. Un indice révélateur de celle-ci : la circulation, depuis dimanche, de SMS signés - faussement - "recommandation de la Monusco" (contingent de l’Onu), indiquant qu’il faut emmener un Bic pour aller voter parce que "ceux fournis par la CENI s’effacent après 30 minutes".
Dans la journée, la CENI a indiqué que l’on devait autoriser à voter avec la seule carte d’électeur, en raison du très grand nombre de gens ne pouvant trouver leur nom sur les listes. "Cette nouvelle est arrivée tard à Goma" (chef-lieu du Nord-Kivu), nous dit une de nos sources dans cette ville, "et de nombreux électeurs étaient déjà partis." Selon cette source, des tirs ont été signalés dans le Masisi, tandis que sur l’île d’Idjwi, "des témoins de partis ont été empêchés d’entrer" dans des bureaux de vote comme le prévoit la loi.
L’agence AP rapporte, de son côté, des cas de bourrage d’urnes à Goma.
A Kinshasa, alors que l’énervement montait en raison des difficultés à voter, on a signalé plusieurs cas de personnes attrapées, le soir, par des électeurs en attente alors qu’elles tentaient d’entrer dans des bureaux de vote déjà fermés munies de sacs pleins de bulletins remplis.
Autre incident, signalé par l’AFP: un barrage de voitures de police et de véhicules blindés a empêché l’opposant Tshisekedi, accompagné de plusieurs milliers de ses partisans, d’aller voter. Il a finalement pu déposer ses bulletins dans un autre bureau de vote.
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lundi 28 novembre 2011
Elections dans la confusion et le désordre
Sanctionner Kabila
Marie-France Cros
Mis en ligne le 28/11/2011
Le Président sortant doit vaincre l’impopularité que lui vaut son incapacité à accomplir ses promesses. Il est aussi vu comme un rempart contre l’UDPS.
Portrait Envoyée spéciale à Kinshasa
Ses trois premières semaines de campagne, Joseph Kabila, 40 ans, les a consacrées à des meetings dans l’est du pays. Exclusivement. Il sait en effet qu’il est peu populaire à l’ouest, acquis à Jean-Pierre Bemba en 2006 et largement à Tshisekedi et Kamerhe cette année; il l’a réservé pour la dernière ligne droite. A l’est, où le candidat n°3 a ses racines familiales, il avait fait des scores de plus de 90 % en 2006. Mais sa popularité y a dégringolé en raison de son incapacité à mettre fin à la violence.
Durant ses premières années à la présidence (2001-2006), où il succéda mystérieusement à son père assassiné, Joseph Kabila avait œuvré à la signature d’un accord de paix, à une cohabitation avec les chefs des anciennes rébellions et à l’organisation d’élections pluralistes. Pour se faire élire, il avait promis de ramener la paix à l’est, où la guerre avait le plus frappé.
Mais ses efforts ont eu pour seul effet incontestable la mise hors d’état de nuire de la rébellion du Tutsi Laurent Nkunda, aujourd’hui intégrée à l’armée, grâce à un accord avec le Rwanda. La collaboration avec ce pays et avec l’Onu pour réduire les rébellions FDLR (Hutus rwandais issus des génocidaires) et maï-maï (bandes armées congolaises) n’a que partiellement abouti. Plusieurs opérations militaires ont réduit le rayon d’action de ces groupes armés, les ont coupés d’une partie de leurs ressources et les ont dispersés; mais une réorganisation de l’armée nationale, ces derniers mois, en déplaçant les troupes, a permis à ces bandes de reprendre du poil de la bête, au détriment des populations. Il y a toujours 1,7 million de Congolais déplacés.
A l’ouest, le Président sortant reste impopulaire. Parce qu’il est de l’est; ses affiches électorales en swahili, langue de l’est, placardées à Kinshasa où l’on parle lingala, lingua franca de l’ouest, y sont diversement appréciées. Impopulaire aussi parce qu’il a concentré les pouvoirs entre ses mains, en dépit de ce que prévoyait la Constitution : contrôle des finances de l’Etat; prédation des richesses nationales par ses proches sans sanctions; mise en place d’une structure parallèle permanente de pouvoir à la Présidence, qui orchestre les ordres du jour du gouvernement; accroissement du pouvoir présidentiel pour réviser la Constitution au détriment du référendum prévu; le chef de l’Etat peut désormais dissoudre les assemblées provinciales et révoquer les gouverneurs élus; non-application de la semi-autonomie financière des provinces, qui devaient retenir " à la source " 40 % des recettes nationales; fin de l’indépendance du pouvoir judiciaire, les parquets étant sous l’autorité du ministre de la Justice, qui peut maintenant empêcher des poursuites
Chez les pauvres - les plus nombreux -, le Président est impopulaire en raison de l’aggravation de leurs conditions de vie depuis 2006. Des "cinq chantiers " promis alors par Joseph Kabila, seul celui des infrastructures est entamé : la construction de boulevards et routes. C’est fondamental pour le développement (sauf quand il s’agit de travaux de prestige, comme le boulevard du 30 Juin), mais la grande majorité des Congolais n’en voit pas encore l’impact sur sa vie quotidienne : "Les routes ! Les routes ! Est-ce que ça se mange, les routes ?" , grondent de nombreux Congolais, qui ne font qu’un repas par jour, voire moins. Dans les milieux riches, on critique le coût de ces voies, plus élevé qu’ailleurs en Afrique.
Les autres chantiers ne sont nulle part : l’emploi ne s’est pratiquement pas accru; l’eau et l’électricité sont nettement moins disponibles qu’il y a cinq ans; le logement reste un problème. Et il n’y a guère d’amélioration dans l’éducation et la santé : malgré la proclamation d’un enseignement "gratuit" pour les premières années primaires, la majorité des parents paient 375 dollars par an pour un enfant à l’école primaire; quant aux hôpitaux, ceux qui existent peinent à assurer leurs tâches, faute de fonds, mais près de 100 millions de dollars auraient été dépensés, selon l’opposition, pour terminer le luxueux hôpital du Cinquantenaire à Kinshasa, qui ne fonctionne pas.
Nonobstant son impopularité, Joseph Kabila est le mieux placé : hors les villes, il dispose d’une administration territoriale qu’il a nommée; son parti est le mieux implanté dans le pays; il use et abuse des moyens de l’Etat; il aura l’appui des partisans du statu quo et de ceux qui craignent une prise de pouvoir par l’ethnie de Tshisekedi, les Lubas, répartis sur toute l’étendue du Congo, contrairement aux autres tribus. Et il serait le bénéficiaire des préparatifs de fraude dénoncés ces derniers jours.
Journée de vote chaotique en RDC
Devant un bureau de vote à Lubumbashi, des électeurs attendent l'arrivée de matériel électoral pour pouvoir voter.
AFP/ Phil Moore
Par RFIDes violences ont été rapportées en RDC en cette journée électorale, notamment dans la province du Katanga où deux policiers et une électrice ont été tués dans l'attaque d'un bureau de poste de Lubumbashi par des hommes armés, deux militaires ont, eux, été blessés. Les opérations électorales se déroulent de manière chaotique sur l'ensemble du territoire congolais.
Une multitude d’incidents ont été signalés presque partout dans le pays. Des électeurs baladés d’un bureau à l’autre qui finissent par se lasser... Mais ce n’est pas le plus grave.
A Kananga, dans le Kasaï Occidental des urnes déjà remplies avant le vote ont été brûlées par la population en colère. Ces cas de bourrage d’urnes sont dénoncés un peu partout. A Fizi, dans le sud-Kivu des bureaux de vote ont été fermés en début d’après-midi parce que les urnes étaient déjà pleines. A Kinshasa, dans les quartiers populaires à l’Est, à Masina, des bureaux de vote n’ont que les bulletins des législatives, ils n’ont pas reçu ceux de la présidentielle.
Deux villes du Bandundu Tembo et Banzi n’ont pas reçu le matériel électoral ce lundi matin parce que l’avion qui le transportait – ça ne s’invente pas – s’est retrouvé à court de carburant et a dû se poser ailleurs où il n’a pas pu refaire le plein.
Impossible de citer tous les incidents. L’un des derniers en date : la découverte de centaine de bulletins déjà cochés dans le coffre d’une voiture. Une foule en colère est allée montrer cette découverte au bureau des Nations unies.
Etienne Tshisekedi a finalement pu voter
Etienne Tshisekedi a pu voter après avoir tenté en vain de rejoindre une circonscription où manquaient les bulletins de la présidentielle. Sans doute pour mettre en exergue ce fait, il a fait demi-tour devant un barrage policier et s’est rendu dans un autre bureau. Pour le président sortant Joseph Kabila cela s’est passé plus calmement dans un bureau du centre-ville, l’un des rares à avoir fonctionné normalement.
Elections en RDC : violences et incidents se multiplient
A Kinshasa, des membres de la garde présidentielle de Joseph Kabila patrouillent devant le bureau de vote où se trouve le président sortant, le 28 novembre 2011.
REUTERS/Finbarr O'Reilly
Par RFISi la capitale Kinshasa restait calme ce lundi 28 novembre, jour d'élections présidentielle et législatives, deux policiers et une électrice ont été tués à Lubumbashi, la capitale de la province du Katanga (sud-est) dans l'attaque d'un bureau. A Kananga, au Kasaï oriental (centre), fief de l'opposant Etienne Tshisekedi, des bureaux de vote ont été incendiés, des bulletins volés et d'autres déjà mis dans des urnes avant l'ouverture du scrutin.
A la mi-journée ce lundi 28 novembre, le processus électoral semblait globalement chaotique avec une multiplication d’incidents. Les plus graves se sont déroulés à Lubumbashi, la capitale de la province du Katanga (sud-est) : deux policiers et une électrice ont été tués dans l'attaque d'un bureau par des hommes armés en civil. Un peu plus tôt, des rafales d'armes automatiques avaient provoqué un mouvement de panique dans le quartier Njanja, où de nombreuses personnes se sont mises à courir pour se mettre à l'abri. Vers midi, on ignorait encore la provenance et les raisons de ces tirs.
Situation tendue également à Kananga dans la province du Kasaï Oriental, où une congrégation religieuse est soupçonnée de participer à une opération de fraude en faveur du pouvoir. Une religieuse accusée d’être en possession d’un bulletin déjà pré-rempli a été molestée ; elle a pu s’enfuir en courant vers le couvent. Un peu plus tard, ce couvent a été attaqué à coups de pierres et saccagé. Ensuite, le Grand Séminaire de Malole était à son tour mis à sac.
Des urnes déjà remplies avant les opérations de vote ont été brûlées par la population en colère. D’après des témoins, la Police nationale congolaise n’est pas en mesure de ramener l’ordre.
A Mbuji Mayi, dans le Kasaï Occidental, des bulletins de vote de la présidentielle ne portent pas le candidat N°11 (Etienne Tshisekedi) en bas de page : « problème de découpe », dit-on à la Céni.
Dans le Bandudu, les villes de Tembo et Banzi n’avaient pas reçu le matériel électoral ce matin. Un avion de l’armée congolaise a décollé de Kinshasa, mais à court de kérosène, il a dû se poser sur le terrain de Kikwit où il s’est retrouvé bloqué faute de carburant disponible.
A Beni, dans le Nord Kivu, la population de la ville est inquiète suite une évasion massive à la prison de la ville ce matin à 6H00. Quelque 429 détenus se sont échappés, dont 126 prisonniers militaires. Les policiers commis à leur garde ont été tués. Le nombre de victimes n’est pas encore connu.
Dans la capitale Kinshasa, la situation reste calme. Tous les bureaux ont ouvert en retard à l’exception de ceux du quartier central de la Gombe où Joseph Kabila a voté ce matin. Dans les quartiers populaires de l’est de la ville, certains bureaux n’étaient toujours pas ouverts en fin de matinée. A Masina, on trouvait les bulletins des législatives, mais pas ceux de la présidentielle.
N.B: Vers la fin du reportage, le correspondant de FR24 dit que Étienne Tshisekedi ne vaut guère mieux que Joseph Kabila. D'ailleurs il est recherché pour viol de centaines de femmes à l'Est du pays.
Naturellement, c'est faux. J'ai essayé de joindre la rédaction du journal à Paris, sans succès. Je demande donc aux lecteurs à ne pas s'inquiéter pour cette fausse information.
FR24 vient de s'excuser auprès des congolais suite à un dérapage de son journaliste après qu'il eu tenu des propos controversés et mensongers à l'endroit de monsieur Étienne Tshisekedi.
Voici le texte:
RD Congo : mise au point
FRANCE 24 a décidé de fermer provisoirement les commentaires de cette page en raison de la violence ou du caractère injurieux de certains propos postés.
Dans ce métier, il faut savoir tenir bon quand on sait avoir raison…Il faut aussi savoir reconnaître lorsque l’on s’est trompé. Après tout, les journalistes ne sont pas infaillibles et on peut parfois céder à la précipitation et à la confusion. C’est ce qui m’est arrivé, je le dis humblement mais sans difficulté, alors qu’hier j’ai évoqué ici des accusations de viols contre le candidat Tshisekedi ou son entourage dans l’est du pays. Il s’agit d’une méprise de ma part.
Il y a hélas beaucoup d’accusation de ce genre en RDC et j’ai pris pour des amis politiques du candidat des gens réellement accusés de telles horreurs et qui se présentent aux législatives. C’était tout simplement faux.
Il y a eu depuis hier de très nombreux appels de Congolais choqués, parfois en colère, je peux parfaitement le comprendre et c’est vrai que je leur dois des excuses - en accord avec la direction de la chaîne - tout comme évidement à M. Tshisekedi. Cela dit, pour couper court à toute théorie du complot, je tiens à dire que cette erreur (qui est seulement la mienne) a été commise de bonne foi, que France 24 est rigoureusement impartiale dans cette campagne.
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