Le "truand" Daniel Ngoy Mulunda. Photo Cheikfitanews
Qui ne se souvient de ce western spaghetti devenu un classique du cinéma italien qui refusait de laisser aux seuls américains le monopole des films dédiés aux cow-boys? Jonchés sur leurs chevaux, coiffés d’un chapeau large bord et arborant à leurs ceintures un Smith & Wesson du nom des inventeurs des revolvers, ces américains, généralement des éleveurs, conduisaient leurs troupeaux dans le lointain Ouest des Etats-Unis. Là où, selon la légende, l’herbe était la plus verte. Un long périple souvent semé d’embûches et le risque était grand de croiser, en chemin, des aventuriers de toute sorte. Voilà que ce classique italien vient de franchir la méditerranée pour renaître sur le continent africain. Précisément, en République très très démocratique du Congo. Sauf que dans ce pays le cinéma a fait place à la réalité !
Selon mon ami qui sait tout sur tout et presque tout sur rien à Kinshasa-Lez-Immondices, comme dans le scénario initial, le film met en scène trois personnages. Les deux premiers convoitent le contrôle de la ville. L’un, très populaire, a été élu par ses concitoyens comme nouveau Shérif. Cependant, il est empêché de faire son travail par une bande organisée, à la gâchette facile, qui tient toute la population en respect. A la tête du fameux gang, un homme sans foi ni loi. Le seul langage qu’il comprenne est celle des armes. Le troisième personnage du film, lui, tire les ficelles. Tantôt aux côtés du Shérif tantôt proche du gang. Il attend son heure en distillant la bonne parole. Il se veut apaisant.
Mon ami qui décidément à l’imagination fertile voit dans le rôle du bon Etienne Tshisekedi alias le «sphinx de Limete» alias «Mwena Nkwassa». En sa qualité de nouveau Shérif, «Tshi-Tshi» a l’ambition de remettre le pays sur les rails en y instaurant l’Etat de droit et la démocratie. La population voit en lui le sauveur qui débarrassera le Congo de cette bande des malfaiteurs. Comme le ferrait tout bon Shérif en prenant ses fonctions, la tête du chef de gang est mise à prix contre remise d’une récompense substantielle. Le reste de la bande est menacé d’arrestation. Le shérif appelle la population à résister contre les méfaits du gang.
Le rôle de la brute et chef de gang revient au «raïs» alias l’«autorité morale», alias "la haute hiérarchie". Il a la force brutale. Il méprise la population qu’il a clochardisée. Il lance sa horde de nervis contre les mécontents et n’a aucun remord à faire tirer dans la foule désarmée. Le hic est qu’il a l’imperium que cherche le Shérif et l’utilise contre sa population.
Enfin dans le rôle du truand, le tireur des ficelles, Daniel Ngoy Mulunda, le pasteur-pyromane. Il jure par tous les diables, pardon, par tous les dieux, d’être l’église au milieu du village. Il feint ne pas comprendre ce qu’on lui reproche alors qu’il vient d’abattre un "travail de titan". Il excelle dans l’art de retourner sa veste toujours du bon côté. Très matérialiste, il sait comment soutirer l’argent au «raïs» auquel, il avait promis une belle victoire. Promesse tenue.
En guise d’épilogue, mon ami soutient qu’au cinéma, c’est toujours les bons qui gagnent. Dans les westerns, la guerre entre les cow-boys et les Indiens s’achève toujours par la victoire des premiers cités. Dans le bon, la brute et le truand, la brute est abattue, le truand prend la fuite les mains chargées de dollars et le bon instaure la paix dans la région. Je vous laisse imaginer votre propre happy-end.
Jacky Mopipi
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