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Des Congolais de la diaspora lors d’une rencontre politique à Bruxelles. Photo CIC
La domination coloniale belge au Congo, Ludo Martens nous l’a appris, a été une réussite incontestable dans un domaine particulièrement névralgique, celui de la colonisation des cerveaux de l’élite noire. Pour la Belgique, qui n’avait que du charbon comme richesse minière aujourd’hui épuisée, le Congo était un scandale géologique. Produits de l’idéologie évolutionniste des races inferieures, les élites congolaises ont toujours eu la fâcheuse tendance de se regarder et de percevoir leur pays à travers les lunettes des ex-colonisateurs. Ainsi, ils s’imaginent à leur tour que leur pays est un scandale géologique. Pourtant, par rapport aux autres pays africains ou du reste du monde, le Congo est certes potentiellement riche avec ses ressources minières, mais celles-ci ne constituent nullement un scandale géologique. Le regard subjectif de la Belgique sur ces ressources est devenu celui des évolués ou élites congolaises, entraînant celles-ci à voir dans la misère de leur population le résultat obligé des regards rapaces des impérialistes occidentaux sur le sous-sol congolais. D’où la nécessité, pour certains, de conscientiser le peuple dans la lutte contre l’impérialisme ; ce qui expliquerait par ailleurs les fleurs jetées sur Patrice Lumumba et Laurent-Désiré Kabila, présentés comme des héros de la lutte contre l’impérialisme. Mais à y regarder de près, la misère des Congolais est-elle la conséquence directe de l’impérialisme occidental ?
D’emblée, il convient de noter que le Congo n’est pas le seul pays africain disposant d’importantes richesses minières. Les sous-sols du Botswana, du Ghana et de la Zambie voisine, pour ne citer que ces trois pays, en regorgent également. Pourtant, qu’il s’agisse de la gouvernance, de la paix civile ou encore de la paix sociale, ces pays sont de loin en avance par rapport au Congo. Par ailleurs, l’impérialisme ne s’exerce pas seulement vis-à-vis des pays pauvres. Il s’exerce également et surtout entre pays riches comme nous allons le démontrer tout à l’heure.
Le 16 juin 1993, la Belgique se dotait d’une loi dite de compétence universelle en matière de répression des crimes de droit international humanitaire. Non seulement, tout auteur de ces faits à travers le monde pouvait être poursuivi sans que son extradition eût été demandée par un autre Etat mais, en outre, les poursuites et un procès pouvaient être menés même en l’absence de l’auteur sur le territoire belge. Tant que les juges belges étaient saisis pour des crimes perpétrés par des dirigeants des pays pauvres, la Belgique se félicitait d’être devenue le gendarme du monde. Mais aussitôt que des Arabes saisirent la justice belge pour les crimes commis par George Bush et d’autres dirigeants américains en Irak, la colère et les pressions des Etats-Unis s’abattirent sur la Belgique à un point tel qu’à peine installés, les membres du nouveau parlement issu des élections de mai 2003 étaient sommés de rester à Bruxelles pour remettre l’ouvrage sur le métier. Telle la grenouille qui voulait se faire aussi grosse qu’un bœuf, la loi de compétence universelle belge creva le 5 août de la même année. Les nobles ambitions du législateur belge étaient ainsi terrassées par l’impérialisme yankee.
Au début de l’année 2009, la pierre angulaire de la finance helvétique, le secret bancaire, entendu comme mécanismes permettant à des personnes morales ou physiques de détenir des avoirs bancaires de façon plus ou moins anonyme, était confrontée au Ministère de la Justice américain, qui avait annoncé avoir porté plainte au civil devant un juge fédéral de Miami pour exiger que la banque suisse UBS livre des informations sur 52.000 comptes secrets identifiés par le fisc comme appartenant à des Américains et qui recèleraient près de 15 milliards de dollars d’actifs. Forte de sa réputation de n° 1 mondial de la gestion de fortune, UBS avait aussitôt fait savoir qu’elle se battrait en justice pour refuser cette demande qui remettait en cause le principe même du secret bancaire « à la suisse ». Les médias et la classe politique helvétiques avaient également donné de la voix, dénonçant le comportement de puissance inacceptable ou encore les méthodes de gangster des Etats-Unis. La suite, on la connaît. Contrairement à ce que nous apprend la Bible, realpolitik oblige, David n’a pas eu raison de Goliath. En effet, au bout de ce feuilleton qui avait pris l’allure d’une guerre économique menée contre la place financière helvétique sans doute afin de rendre plus attrayants les paradis fiscaux américains, la remise de données bancaires aux Etats-Unis a non seulement eut lieu, mais, en outre, elle s’est passée sans le moindre respect de la voie judiciaire et avec la complicité du gouvernement suisse.
Ce ne sont pas les nationalistes qui manquent aux deux Etats ci-dessus. Mais dans le face à face inégal contre l’impérialisme yankee, les dirigeants belges et suisses savaient que certains de leur « bon droit », les Etats-Unis iraient jusqu’au bout de leur politique de puissance. A cet égard, des deux maux, tout homme politique responsable se devait de choisir le moindre. Pour la Belgique, il ne fallait à tout prix contrer la menace de délocalisation du siège de l’OTAN que brandissait Washington, qui allait certainement prendre d’autres mesures de rétorsion plus dramatiques pour le peuple belge. Pour la Suisse, il était clair que les accusations de fraude fiscale contre UBS aux Etats-Unis auraient pu menacer l’existence même de la banque. Par ailleurs, résister contre les demandes américaines finirait par mettre encore davantage à mal le secret bancaire « à la suisse », pilier de la prospérité du pays.
A la lumière de ce qui précède, présenter Patrice Lumumba et Laurent-Désiré Kabila comme des modèles à suivre dans la lutte contre l’impérialisme est non seulement d’une naïveté extrême, mais aussi et surtout irresponsable. Les Congolais ne sont pas le seul peuple à être dominé. Leurs dirigeants doivent apprendre à gérer les regards rapaces des puissances occidentales de manière à ne pas attirer les foudres occidentales sur le peuple. Après la mauvaise gestion excusable de ces regards par Lumumba en 1960, ivresse de l’indépendance oblige, on se serait attendu à ce que tous les Congolais chantent à l’unisson avec Tina Turner dans « Mad Max » : « We don’t need another hero ». Car cette gestion nous avait valu des torrents de larme et de sang entre 1960 et 1965. Mais l’obscur trafiquant d’or Laurent-Désiré Kabila s’est autoproclamé « nationaliste » et les Congolais l’ont suivi dans cette nouvelle folie. Celle-ci nous a laissé à son tour le plus grand drame humain après la Deuxième Guerre mondiale, à savoir six millions de morts à qui les maîtres de ce monde dénient ouvertement toute justice. Tokofunda bango wapi ?
Le combat contre l’impérialisme doit certes être mené. Mais non seulement nous n’en avons pas les moyens, mais, en outre, il n’a jamais été prioritaire depuis notre indépendance. Aujourd’hui comme hier, l’intérêt supérieur de la nation exige que nous gagnions un premier combat déjà difficile. Il s’agit de répondre aux besoins fondamentaux de la population dans le contexte de l’ordre ou du désordre mondial actuel, plutôt que de nous lancer dans une guerre perdue d’avance pour un idéal, qui s’avère être une chimère : l’indépendance totale et immédiate ou le nationalisme pur et dur. Compte tenu des potentialités du sol et du sous-sol de notre pays, nous pouvons réussir ce pari mieux que n’importe quel autre Etat africain, à condition de mettre en place un système de gouverne où les contre-pouvoirs fonctionnent effectivement. Aussi ignobles soient-ils, les impérialistes ne nous ont jamais empêchés de le faire, car depuis l’indépendance, nous ne faisons que vouer un culte béat à la démocratie de façade, celle-là même qui pérennise la dictature dans notre pays. Commençons par gagner ce premier combat. Et le Congo fera un bond prodigieux.
D’emblée, il convient de noter que le Congo n’est pas le seul pays africain disposant d’importantes richesses minières. Les sous-sols du Botswana, du Ghana et de la Zambie voisine, pour ne citer que ces trois pays, en regorgent également. Pourtant, qu’il s’agisse de la gouvernance, de la paix civile ou encore de la paix sociale, ces pays sont de loin en avance par rapport au Congo. Par ailleurs, l’impérialisme ne s’exerce pas seulement vis-à-vis des pays pauvres. Il s’exerce également et surtout entre pays riches comme nous allons le démontrer tout à l’heure.
Le 16 juin 1993, la Belgique se dotait d’une loi dite de compétence universelle en matière de répression des crimes de droit international humanitaire. Non seulement, tout auteur de ces faits à travers le monde pouvait être poursuivi sans que son extradition eût été demandée par un autre Etat mais, en outre, les poursuites et un procès pouvaient être menés même en l’absence de l’auteur sur le territoire belge. Tant que les juges belges étaient saisis pour des crimes perpétrés par des dirigeants des pays pauvres, la Belgique se félicitait d’être devenue le gendarme du monde. Mais aussitôt que des Arabes saisirent la justice belge pour les crimes commis par George Bush et d’autres dirigeants américains en Irak, la colère et les pressions des Etats-Unis s’abattirent sur la Belgique à un point tel qu’à peine installés, les membres du nouveau parlement issu des élections de mai 2003 étaient sommés de rester à Bruxelles pour remettre l’ouvrage sur le métier. Telle la grenouille qui voulait se faire aussi grosse qu’un bœuf, la loi de compétence universelle belge creva le 5 août de la même année. Les nobles ambitions du législateur belge étaient ainsi terrassées par l’impérialisme yankee.
Au début de l’année 2009, la pierre angulaire de la finance helvétique, le secret bancaire, entendu comme mécanismes permettant à des personnes morales ou physiques de détenir des avoirs bancaires de façon plus ou moins anonyme, était confrontée au Ministère de la Justice américain, qui avait annoncé avoir porté plainte au civil devant un juge fédéral de Miami pour exiger que la banque suisse UBS livre des informations sur 52.000 comptes secrets identifiés par le fisc comme appartenant à des Américains et qui recèleraient près de 15 milliards de dollars d’actifs. Forte de sa réputation de n° 1 mondial de la gestion de fortune, UBS avait aussitôt fait savoir qu’elle se battrait en justice pour refuser cette demande qui remettait en cause le principe même du secret bancaire « à la suisse ». Les médias et la classe politique helvétiques avaient également donné de la voix, dénonçant le comportement de puissance inacceptable ou encore les méthodes de gangster des Etats-Unis. La suite, on la connaît. Contrairement à ce que nous apprend la Bible, realpolitik oblige, David n’a pas eu raison de Goliath. En effet, au bout de ce feuilleton qui avait pris l’allure d’une guerre économique menée contre la place financière helvétique sans doute afin de rendre plus attrayants les paradis fiscaux américains, la remise de données bancaires aux Etats-Unis a non seulement eut lieu, mais, en outre, elle s’est passée sans le moindre respect de la voie judiciaire et avec la complicité du gouvernement suisse.
Ce ne sont pas les nationalistes qui manquent aux deux Etats ci-dessus. Mais dans le face à face inégal contre l’impérialisme yankee, les dirigeants belges et suisses savaient que certains de leur « bon droit », les Etats-Unis iraient jusqu’au bout de leur politique de puissance. A cet égard, des deux maux, tout homme politique responsable se devait de choisir le moindre. Pour la Belgique, il ne fallait à tout prix contrer la menace de délocalisation du siège de l’OTAN que brandissait Washington, qui allait certainement prendre d’autres mesures de rétorsion plus dramatiques pour le peuple belge. Pour la Suisse, il était clair que les accusations de fraude fiscale contre UBS aux Etats-Unis auraient pu menacer l’existence même de la banque. Par ailleurs, résister contre les demandes américaines finirait par mettre encore davantage à mal le secret bancaire « à la suisse », pilier de la prospérité du pays.
A la lumière de ce qui précède, présenter Patrice Lumumba et Laurent-Désiré Kabila comme des modèles à suivre dans la lutte contre l’impérialisme est non seulement d’une naïveté extrême, mais aussi et surtout irresponsable. Les Congolais ne sont pas le seul peuple à être dominé. Leurs dirigeants doivent apprendre à gérer les regards rapaces des puissances occidentales de manière à ne pas attirer les foudres occidentales sur le peuple. Après la mauvaise gestion excusable de ces regards par Lumumba en 1960, ivresse de l’indépendance oblige, on se serait attendu à ce que tous les Congolais chantent à l’unisson avec Tina Turner dans « Mad Max » : « We don’t need another hero ». Car cette gestion nous avait valu des torrents de larme et de sang entre 1960 et 1965. Mais l’obscur trafiquant d’or Laurent-Désiré Kabila s’est autoproclamé « nationaliste » et les Congolais l’ont suivi dans cette nouvelle folie. Celle-ci nous a laissé à son tour le plus grand drame humain après la Deuxième Guerre mondiale, à savoir six millions de morts à qui les maîtres de ce monde dénient ouvertement toute justice. Tokofunda bango wapi ?
Le combat contre l’impérialisme doit certes être mené. Mais non seulement nous n’en avons pas les moyens, mais, en outre, il n’a jamais été prioritaire depuis notre indépendance. Aujourd’hui comme hier, l’intérêt supérieur de la nation exige que nous gagnions un premier combat déjà difficile. Il s’agit de répondre aux besoins fondamentaux de la population dans le contexte de l’ordre ou du désordre mondial actuel, plutôt que de nous lancer dans une guerre perdue d’avance pour un idéal, qui s’avère être une chimère : l’indépendance totale et immédiate ou le nationalisme pur et dur. Compte tenu des potentialités du sol et du sous-sol de notre pays, nous pouvons réussir ce pari mieux que n’importe quel autre Etat africain, à condition de mettre en place un système de gouverne où les contre-pouvoirs fonctionnent effectivement. Aussi ignobles soient-ils, les impérialistes ne nous ont jamais empêchés de le faire, car depuis l’indépendance, nous ne faisons que vouer un culte béat à la démocratie de façade, celle-là même qui pérennise la dictature dans notre pays. Commençons par gagner ce premier combat. Et le Congo fera un bond prodigieux.
Nkwa Ngolo Zonso
© Congoindépendant 2003-2012
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