La RD Congo, un Etat à bâtir institutionnellement et à développer économiquement
Les orientations politiques et économiques à prendre en vue d’une République Démocratique du Congo institutionnellement cohérente et économiquement puissante ne peuvent être définies que par rapport au passé et à l’héritage que l’on compte laisser aux futures générations. Indissociable du passé, le présent doit en principe permettre la mise au point pour mieux préparer l’avenir. Dans cette optique, les options relatives au futur ne sauraient faire abstraction des facteurs institutionnel et politique, préventif et sécuritaire, économique et social, diplomatique et régional. Par sa situation géographique, la République Démocratique du Congo a toujours représenté un enjeu géostratégique par rapport à la géopolitique mondiale.
Ressources naturelles et convoitises
La République Démocratique du Congo est un pays très vaste, 5 fois plus grand que la France et 80 fois plus étendu que la Belgique, qui compte plus de 65 millions d’habitants. Un territoire très riche qui partage ses frontières avec neuf autres pays, dont quelques-uns sont animés d’un vorace appétit expansionniste. Un pays qui est en guerre depuis plus d’une quinzaine d’années.
Si ce territoire aux frontières artificielles s’active autour du fleuve Congo, sa grande diversité ethnique a toujours été une source de différents conflits fonciers à la fois internes et externes, civils ou armés. De plus, les principales ethnies appartiennent au groupe bantou et vivent à cheval sur des États voisins. Ainsi la République Démocratique du Congo se situe-t-elle au croisement des quatre grands espaces linguistiques : le lingala au Nord-Ouest, le kikongo au Sud-Ouest, le tshiluba au centre et le swahili à l’Est.
Par ailleurs, le milieu naturel et ses conséquences sociales, ainsi que la carence des infrastructures constituent depuis des lustres un obstacle majeur au développement du pays, tandis que ses ressources naturelles sont très attractives et suscitent des rivalités de pouvoir à l’intérieur du pays et des convoitises à l’extérieur, c’est-à-dire à l’échelle régionale, continentale et extracontinentale. Ces richesses entretiennent sans cesse les conflits qu’a toujours connus ce pays.
Absence de dynamique unitaire
Le nœud du problème qu’il faudra à tout prix dénouer est la compréhension des fondements de la violence en République Démocratique du Congo. Comment se fait-il que, depuis l’indépendance, ce pays est sans arrêt gouverné par un système politique privilégiant l’instabilité ? Violence et instabilité qui sont organisées soit par le gouvernement central, soit par d’autres acteurs. Au-delà de la difficulté du leadership congolais à émerger et à gouverner, c’est-à-dire à s’affirmer, la complexité dans la gestion de la chose publique est en proie à trois dynamiques différentes. Le Katanga et le Kasaï sont attirés par le Sud et l’Afrique australe, alors que le Maniema, le Kivu et la province orientale tendent vers les civilisations sahariennes. Le Bas-Congo et l’Équateur s’intéressent davantage à l’Ouest. Au milieu existe une forêt dense à l’intérieur de laquelle la vie est très difficile. L’appartenance à une communauté nationale existe seulement dans l’esprit des Congolais, mais non dans les échanges quotidiens. Dans ces conditions, on ne peut impulser une dynamique unitaire qu’en développant les moyens de communication et les réseaux routiers. La violence en République Démocratique du Congo représente donc une force politique, une variable d’ajustement pour conserver le pouvoir – l’appartenance ethnique, la logique politicienne et clientéliste étant souvent utilisées en guise de manipulation au détriment du projet de société.
Les différents défis
Dévastée par les conséquences de la première « guerre interrégionale africaine » de 1996 et de longues années de crise sociale et politique, la République Démocratique du Congo est confrontée à plusieurs défis endogènes et exogènes : la restauration de son intégrité territoriale, l’affirmation de sa souveraineté politique, sa réunification administrative, la consolidation de la cohésion nationale, la mise en place d’un appareil d’État performant et transparent, la stabilité des structures étatiques représentatives, la légitimité du pouvoir, la reconstruction physique des infrastructures, la démobilisation et la réinsertion sociale des groupes armés, la gestion durable et responsable des ressources naturelles, l’amélioration du niveau de développement humain de l’ensemble de la population congolaise, la défense du territoire...
Par rapport à ce constat, le nouveau projet de société doit grosso modo évoluer dans deux directions. D’une part, il est impératif de développer une diplomatie performante en vue de la paix dans la région des Grands Lacs. D’autre part, il faudra initier à très court terme une sérieuse politique républicaine qui aura pour finalité la croissance économique – l’objectif étant l’amélioration des conditions de vie des Congolais, la lutte contre la pauvreté, l’évolution sociale, la cohésion nationale et la bonne gouvernance, ainsi que le partenariat économique avec les pays limitrophes. Patriotisme et actions politiques pour quels choix pratiques ?
Un État de droit
La maîtrise du dispositif administratif passera par la réforme profonde de la fonction publique sur la base d’une délégation provinciale interministérielle, de la déconcentration et de la défense nationale. En effet, une maîtrise parfaite des circonscriptions d’actions régionales permettra de mieux cerner le fonctionnement des zones de défense, des académies, de l’inspection et de la médecine du travail, des hôpitaux publics, de l’économie et des transports, des services fiscaux… De ce fait, il faudra marquer la rupture avec le régime semi-parlementaire et semi-présidentiel, en instaurant la IVe République sur la base d’une réforme profonde des institutions – l’objectif étant de conforter les acteurs sociaux, de permettre aux citoyens d’être écoutés et actifs, et de doter les élus du peuple d’un véritable statut pour les protéger dans l’exercice de leurs fonctions, plus précisément contre les arrestations arbitraires et l’abus du pouvoir.
Des projets devront également être déclinés en vue du développement et des services aux populations. Voilà pourquoi les entités provinciales devront contribuer au renforcement de la capacité de l’État à offrir ses services à l’ensemble des citoyens. À cet effet, leurs attributions politiques, administratives et fiscales devront être revues et corrigées par le biais de la représentation nationale, dans le but d’atteindre des objectifs de développement économique et de progrès social dans le cadre d’un partenariat avec le gouvernement central. Cet aspect technique nécessitera un « toilettage » de la Constitution du 18 février 2006.
La déconcentration devra avoir pour préoccupation majeure le management territorial, le partage des responsabilités politiques, économiques, sociales, culturelles ainsi que du fardeau fiscal entre l’État et les collectivités publiques locales. Cela permettra de mieux servir les citoyens et de garantir leur épanouissement individuel, ainsi que leur essor collectif. L’État devra donc être présent là où vivent quotidiennement les administrés, pour leur procurer protection et services publics adéquats. Encore faudra-t-il introduire, dans le paysage politique congolais, des commissaires du gouvernement
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La défense nationale et la protection civile
Il n’est un secret pour personne. La stabilité politique et la croissance économique sont tributaires d’un système de sécurité et de défense performant et républicain : d’où la nécessité de combattre à tout prix l’insécurité et d’asseoir un environnement propice à la reconstruction, ainsi qu’au développement ou alors, plus en amont, à la prévention des crises et des conflits. On réalise donc l’importance d’une politique favorable à la constitution des forces de sécurité civiles et militaires efficaces, bien formées et responsables devant les instances politiques. Il faudra surtout renforcer les institutions étatiques ayant en charge la gestion et le contrôle démocratique des acteurs qui concourent à la sécurité et à la défense nationales, tout en rendant perfectible la chaîne de commandement des forces armées nationales.
La défense et l’intégrité du territoire, la protection des centres et des installations d’intérêts vitaux contre les agressions armées devront nécessiter un intérêt accru, particulier, et un budget considérable. Ces missions devront mobiliser les institutions de la République par la lutte contre toutes menaces susceptibles de compromettre la sécurité nationale et la protection civile. La défense nationale devra désormais être envisagée comme un devoir patriotique consistant à sécuriser et à assurer l’intégrité du territoire, à protéger les centres et les installations d’intérêts vitaux contre les agressions d’origine interne ou externe. Une armée à la fois républicaine et performante est une exigence fondamentale pour la souveraineté étatique. L’armée nationale congolaise devra par conséquent devenir, par sa formation et sa composition, par sa logistique et sa capacité de réaction, un outil sécuritaire capable d’assumer les immenses défis de notre temps en matière de défense, de paix intérieure, de sécurité régionale et internationale, ainsi que sur le plan de la lutte contre le terrorisme et l’espionnage.
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