Dossier DESC : Les corps des
« indigents » qui enterrent le contrat
républicain de Kabila avec les Congolais?
Les corps des « indigents » qui enterrent le contrat
républicain de Kabila avec les Congolais?
Dossier compilé par Jean-Jacques Wondo Omanyundu
Ce n’est plus à démontrer que c’est sous les Kabila, père et fils, que la RDC a connu plus de 6.000.000 de victimes des guerres dont ils ont été des acteurs par procuration de la part de leurs mandants régionaux et internationaux. C’est le chiffre macabre et le souvenir le plus marquant que les analystes retiennent de leurs passages à la tête de la RDC. Par ailleurs, il est admis que si Joseph Kabila a été imposé et maintenu à la tête de la RDC, c’était dans le seul et l’unique but de servir d’agent des prédateurs néolibéraux et de cheval de Troie du Rwanda-Ouganda en RDC. Avec la découverte macabre des plus de 420 corps dans une fosse commune à Maluku, à Kinshasa, la liste des victimes de la gouvernance mortifère des Kabila en RDC semble s’allonger.
Guerre des communiqués contradictoires
Selon la Radio télévision belge francophone (RTBF), citant les médias congolais, une fosse commune contenant 425 cadavres récemment enterrés a été découverte au cimetière de Fula-Fula dans la commune de Maluku, la grande banlieue de Kinshasa située à une centaine de kilomètres du centre-ville de Kinshasa[1]. Dans son édition du journal radio de 6h30, la RTBF a cité le témoignage des riverains de la fosse commune qui ont vu des véhicules militaires faire mouvement et stationner nuitamment sur les lieux où la fosse commune a été retrouvée.
Les versions divergeaient dimanche 5 avril sur l’origine des corps – victimes des incidents survenus fin janvier lors de violentes manifestations dans la capitale congolaise ou indigents décédés de mort naturelle à l’hôpital »[2].
D’après Radio Okapi citant des sources anonymes, ces corps seraient des victimes des événements à la base des violences entre le 19 et le 23 janvier 2015 à Kinshasa, lors de manifestations durement réprimées contre une modification de la loi électorale susceptible de maintenir le président congolais Joseph Kabila au pouvoir au-delà de la fin de son second mandat, en décembre 2016.
Le vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, Evariste Boshab Mabudj, a rejeté cette version. Selon lui, les corps retrouvés sont plutôt ceux d’indigents, gardés longtemps à la morgue centrale de l’Hôpital général de référence de Kinshasa (ex-Mama Yemo) et inhumés par l’hôtel de ville de Kinshasa sur une demande de la direction de la morgue. Selon M. Boshab, le nombre de victimes des manifestations de janvier est « bien connu ». M. Boshab a également déclaré que le gouvernement était disposé à exhumer les corps, si la demande était faite ou si le moindre doute persistait. Evariste Boshab a démenti avec énergie qu’il s’agit d’un charnier ! Rien de tout cela, rétorque-t-il. Il parle des « indigents » que l’hôtel de ville de Kinshasa a décidé d’enterrer. Ces corps, 425, étaient gardés à la morgue de l’Hôpital général de référence de Kinshasa.
Déjà, le 28 mars dernier, le député Martin Fayulu de l’opposition signalait l’existence de ce charnier à Maluku, une commune de Kinshasa : « Il y a des rumeurs qui font de plus en plus état d’une fosse commune que la population de Maluku à Kinshasa aurait découvert depuis quelques jours ».
L’Hôtel de Ville de Kinshasa a, selon le journal Le Phare, jeté un pavé dans la mare. En effet, au cours d’une conférence de presse qu’il a animée mardi 07 avril 2015, le ministre provincial de Kinshasa chargé du Budget, du Plan, des Travaux Publics et des Infrastructures, Robert Luzolanu, a laissé entendre que l’enterrement des indigents et inconnus dans des fosses commune fait partie d’une « pratique ordinaire » au niveau de l’administration urbaine. A l’en croire, l’Hôtel de Ville de Kinshasa s’est chargé de l’inhumation d’un total de 524 personnes au courant de l’année 2014, soit 83 le 02 avril 2014, 343 le 08 juin 2014 et 98 le 21 décembre 2014. Parlant de la fosse commune de Maluku, le même membre du gouvernement provincial de Kinshasa a donné le chiffre de 421 corps, inhumés le 19 mars 2015. Il s’agissait, selon lui, de 300 mort-nés et fœtus abandonnés, 23 corps abandonnés, 64 personnes non identifiées car dépourvues de pièces d’identité et 34 personnes dont les familles étaient incapables de supporter les frais funéraires.
Et Le Phare de confondre les déclarations de Robert Luzolanu qui « n’a pas précisé dans quel cimetière de la capitale étaient enterrés les 524 corps de l’exercice 2014. On note, d’emblée, que le bilan des « indigents » ou mort-nés inhumés à Kinshasa à l’insu de la majorité de la population ces deux dernières années s’élève à 524 + 421 = 945. S’il faut prendre cet officiel au mot, à savoir que le recours aux fosses communes relève d’une « pratique ordinaire », les observateurs peuvent être tentés de lui demander les statistiques du mandat du gouverneur André Kimbuta, en poste depuis 2007 ». Il serait d’ailleurs intéressant que l’enquête en cours puisse identifier au moins les 34 personnes indigentes et leurs familles respectives qui étaient incapables de supporter les frais funéraires car elles sont connues de l’administration de l’Hôpital et des autorités administratives de Kinshasa !, éclaire Le Phare.
Pourquoi signaler à la MONUSCO et non pas aux autorités congolaises
La découverte a été faite par la population de ce coin de la capitale, qui a saisi la MONUSCO (Mission de l’ONU pour la stabilisation de la RDC) pour dénoncer des odeurs nauséabondes qui se dégageaient de l’endroit. Ainsi, le fait que les populations aillent signaler cette fosse commune à la MONUSCO plutôt qu’aux autorités congolaises compétentes dénote du manque de confiance de la population à l’égard du pouvoir congolais. Il s’agit là d’un signe évident que ces populations qui ont vu les mouvements suspects des véhicules militaires à cet endroit savaient qu’il s’agissait des comportements anormaux. La population craignait qu’en signalant ce charnier et ce remue-ménage suspect des véhicules militaires auprès des autorités judiciaires compétentes, le dossier allait vraisemblablement aboutir à un classique classement sans suite auquel le régime Kabila nous a habitués chaque fois qu’il est mis en cause. L’autre lecture politique de ce comportement des populations est qu’il s’agit là d’une preuve évidente de rupture de contrat social et républicain entre les gouvernés et leurs gouvernants, un signe de la persistance de la crise de légitimité du pouvoir qui ne recueille plus l’adhésion populaire à son action politique marquée par le déficit démocratique, des réformes sociales en trompe-l’œil avec des changements sans évolution sur le vécu des citoyens, une gouvernance clientéliste et kleptocratique ainsi qu’ une répression aveugle de ses contestataires.
Plusieurs sources doutent qu’il s’agit des indigents – Des questions sans réponses qui confondent le gouvernement congolais
Les déclarations avancées dans la précipitation par les autorités congolaises, prises au dépourvu suscitent des interrogations. 425 « indigents » que l’on enterre nuitamment dans une fosse commune, sans que les habitants des quartiers avoisinant le cimetière ne s’en rendent compte, en combien de temps cette pléthore s’est-elle constituée ? Quelle est la capacité de la morgue de l’hôpital Général pour contenir tous ces morts en plus des morts identifiées qui y séjournent ? Le temps que ces cadavres ont passé dans cette morgue reste une inconnue ? [3]. Est-ce le Gouvernorat de Kinshasa procède régulièrement à ces tyes d’enterrement puisqu’il parle d’une pratique banale. Dans l’affirmative, peut-il nous montrer d’autres fosses communes où des inhumations collectives similaires d’indigents sont effectuées en nombre ?
Selon Jérôme Ziambi Kengawe, analyste chez DESC : « Le gouvernement congolais ment… Pourquoi enterrez ces cadavres durant la nuit ? Le nombre des cadavres dépasse la capacité de places de la morgue de Mama Yemo (L’Hôpital général de Kinshasa). On constate d’ailleurs la contradiction dans les déclarations de Lambert Mende et d’Evariste Boshab… Normalement, c’est le Procureur général qui aurait dû s’exprimer et non le ministre de la l’Intérieur… D’autre part, le fait que ce soient les militaires qui aient été chargés de procéder à l’inhumation, avaient-ils un ordre de réquisition de l’armée en bonne et due forme? Il y a trop de zones d’ombre qui accréditent la thèse des victimes des répressions du régime. Et puis ces enterrements sont contraires à toutes les valeurs culturelles religieuses du Congo… c’est de de l’irrespect vis à vis des morts ».
A propos de cette contradiction qui met en lumière l’absence de coordination et de cohésion de l’équipe gouvernementale qui, au passage, ne se réunit que sporadiquement, le vice-Premier ministre en charge de l’Intérieur, Evariste Boshab, a d’abord évoqué la possibilité de procéder à des exhumations, en cas de doute. Mais lundi 6 avril, le ministre de la Communication, Lambert Mende, l’a ouvertement contredit et s’est fermement opposé à une telle opération. Sans doute, il a des raisons évidentes qui l’ont poussé à cacher la vérité à la population qui cherche à être éclairée sur cette affaire. Il s’agit là d’une attitude qui montre le malaise du Gouvernement. Surtout que ce refus vient du ministre Mende qui n’a pas bonne presse auprès de l’opinion congolaise qui le considère comme un « fou du roi » et qui ne prend plus au sérieux ses propos, fussent-ils véridiques, à force de mentir, de se contredire ou d’user de sophisme dans ses interventions transformées en une sorte de « one man show » pathético-comique!
Comme l’évoque encore le journal Le Phare qui ne va pas du dos de la cuillère : « Toujours au chapitre des interrogations, ils sont curieux de connaître les causes ayant entraîné les décès de ces 856 personnes : accident de circulation, maladie, chagrin, bavures policières, attaque à main armée, agression de « Kuluna », torture, suicide, noyade, etc. Il est à espérer que des bulletins médicaux de ces inconnus seraient disponibles au niveau des morgues ayant requis leur inhumation. Enfin, plus d’un continue de se demander si le gouvernement central et le gouvernement provincial de Kinshasa manquent des moyens pour inhumer, dans la dignité, 945 concitoyens. En prenant une moyenne de 200 dollars par personne, la dépense totale serait inférieure à 200.000 dollars américains. Dans le cas d’une trésorerie nationale et kinoise au rouge, on aurait pu lancer des appels des fonds auprès de nombreux ministres, parlementaires, mandataires publics et opérateurs économiques passés maîtres dans le paiement des factures d’hospitalisation des indigents dans les formations médicales de la place. La fosse commune de Maluku constitue un fâcheux précédent dans cette ville où des familles continuent de chercher, voici des années et des mois, des proches parents portés disparus et dont la mort n’a jamais été officiellement confirmée. Avec les révélations du ministre provincial du Budget, du Plan, des Travaux Publics et des Infrastructures, elles seraient en droit de lui adresser des mémos en vue d’obtenir d’éventuels renseignements sur ce qui leur serait arrivé à leur insu ».
Sur Vox of America, la Croix Rouge de la RDC a nié qu’elle a été associée par le Gouvernement congolais dans la procédure d’inhumation des 421 cadavres retrouvés à Maluku. Il s’agit là d’une contradiction qui met le régime congolais en mauvaise posture, l’isole et le discrédite davantage.
Pour Timothée Tshaombo, collaborateur de DESC et ancien chargé de mission de Joseph Kabila : « Bonjour Cher Jean Jacques. Juste pour te signifier pour éventuellement notre rédaction de DESC, que selon un ami proche, qui fait partie du service de renseignement de la police, sous le commandement du Général Kanyama dit Esprit de mort, recoupé aux informations reçues par un journaliste très proche aux officiers de police proches au Général Bisengimana, que les centaines des gens enterrés à Maluku dans cette fosse commune sont d’une part certains Congolais refoulés dernièrement de Brazzaville lors des opérations MBATA YA MOKOLO et ceux du massacre du 19, 20 et 21 janvier dernier. On y a sciemment enterré quelques bébés et des ‘indigents’ c’est vrai, pour brouiller les pistes, mais cette opération est connue de la haute hiérarchie me confirme-t-il ».
Selon l’analyste congolais Kiassi : « Alors ce que le porte-parole du Gouvernement doit savoir, c’est que cette situation n’est pas une habitude… d’enterrer même les indigents de façon indigne. En RDC, il y a un ministère des Affaires sociales qui reçoit des subsides du Gouvernement pour ça. Et que s’il en est ainsi, selon Mende qui dit que c’est une coutume du Gouvernement d’enterrer les gens comme ça. Mende doit nous montrer d’autres fosses communes pour que nous enterrions dignement nos morts que Kabila banalise. Il y a de l’espace pour ça. En effet, l’enterrement, dans une même fosse, de plus de quatre cent personnes inconnues, sans familles et sans ressources, aurait paru normal s’il avait été précédé d’une large publicité, dans le but de permettre à d’éventuels proches parents ou connaissances de passer par la morgue de l’ex-Mama Yemo pour s’assurer que les leurs ne se trouvaient pas dans le tas. Il n’y aurait rien à redire si l’Hôtel de Ville de Kinshasa avait intéressé les organisations non gouvernementales nationales et internationales des droits de l’homme, la justice, etc. Pourquoi c’est la population de Maluku qui a constaté la persistance d’odeurs insupportables dans son milieu de vie ? Pourquoi la direction de la morgue de l’Hôpital Général de Référence de Kinshasa a-t-elle attendu que les statistiques d’indigents grimpent jusqu’au-delà de quatre-cents pour saisir l’Hôtel de Ville. N’était-il pas plus pratique et moins compromettant de désengorger la morgue par vagues de vingt, trente ou quarante corps abandonnés ? Qu’est-ce qui a manqué à l’administration urbaine ou au gouvernement central pour dispatcher les indigents décédés et abandonnés entre la multitude de sites d’inhumation de la capitale, du Bandundu et du Bas-Congo ? »
« Dans quel état les quatre cents corps à problème se trouvaient-ils avant leur dernier «voyage» vers Maluku et dans quelles conditions étaient-ils mis sous terre, pour qu’ils se mettent à empester l’atmosphère ? Par respect pour les disparus, n’était-il possible de leur faire fabriquer des cercueils «économiques » et de les couvrir de draps à faible coût ? La fosse commune n’était-elle pas suffisamment profonde et spacieuse pour que ses « locataires » laissent échapper des odeurs peu commodes pour leurs frères et sœurs vivant à Maluku ?« , s’interroge M. Kiassi.
L’entourage militaire de Kabila parle d’un chantage grossier monté par Martin Kobler
Ces sources militaires du cercle fermé de Kabila évoquent un nouveau chantage de la MONUSCO et des Occidentaux afin d’infléchir la position de Kabila par rapport à son refus de mener les opérations contre les FDLR avec la MONUSCO. Ils parlent de l’opération « Lititi mboka bis » (nom de code donné à l’opération des événements du campus de Lubumbashi en 1990 sous Mobutu), montée de toutes pièces à l’image du fameux charnier de Timisoara (en Roumanie Ceausescu) où la CIA est allée acheter des corps à coups de dollars dans différentes morgue de Roumanie et les enterrés à Timisoara. Et le pauvre Ceausescu et sa femme ont été fusillés avec ce gros mensonge. Et la source de signaler que « la FIDH, Humain Rigth Watch, Amnesty international ont fait des rapports finaux par rapport aux événements du 19, 20, 21 et 22 janvier 2015. Tous ont parlé entre 30 à 65 morts. D’où viennent ces morts? s’interroge cet officier supérieur de la DEMIAP[4].
Pour l’entourage militaire de Kabila, il s’agit d’un pétard mouillé, une manipulation de plus de la MONUSCO qui bizarrement découvre et exhume le charnier. Le pré-carré militaire de Kabila semble serein et parle d’ »un montage mal cousu qui n’aura aucune conséquence politique pour le boss qui continue à conserver les leviers du pouvoir. Une source de l’ANR[5] donne pour preuve que le quart de corps exhumés sont des bébé (morts-nés). Les bébés n’ont quand même pas participé aux événements de janvier 2015 ? N’est-ce pas c’est à la fois ridicule et absurde? », conclut-elle.
L’entourage de Kabila stigmatise Martin Kobler comme étant à la base de ce montage grossier. En fin de mission d’ici à la fin de cette année, l’entourage de Kabila nous déclare que Kobler voudrait au-moins terminer son mandat en RDC sur une note positive après avoir échoué en Irak où il a débarqué sur les pointes de pieds. « M. Kobler se trompe sérieusement. Il n’a aucun pouvoir de décision en RDC et ne pourra jamais changer la donne politique en RDC. Il ne peut même pas décider sur qui sera le président du Congo. Le fera-t-il avec quelles forces et quels moyens ? Ne lui donnez surtout pas des pouvoirs qu’il n’a pas et s’il était réellement aussi puissant comment se fait-il humilier chaque jour par le boss devant qui il rampe pour obtenir même un échange téléphonique ?Le boss refuse catégoriquement de le recevoir même pour 5 minutes. C’est juste un homme frustré! »
A ces arguments de l’entourage de Kabila, un responsable de la MONUSCO nous répond que « le régime Kabila se défonce lui-même par ses propres contradictions. Les informations publiées sur Radio Okapi sont véridiques car recueillies et déjà vérifiées par les services de renseignement de la MONUSCO. L’enquête conjointe menée avec la justice congolaise est juste pour veiller à ce que la justice congolaise ne soit pas manipulée par le pouvoir. Déjà nos équipes sont sur terrain, à Maluku, pour surveiller les lieux 24h sur 24 afin d’empêcher toute dissimulation ou destruction des preuves. »
Conclusion: Ceci s’ applique à fortiori pour les corps abandonnés.
ORDONNANCE 78-179 du 26 avril 1978 portant réglementation de l’autopsie scientifique.
Art. 4. – Un corps abandonné, c’est-à-dire un corps qui n’est pas réclamé et qui n’est pas susceptible de l’être peut être livré à l’autopsie scientifique par le commissaire de région ou son délégué après un délai de 15 jours qui court à partir de la constatation du décès. Pendant ce temps, tous les moyens de communication seront mis en œuvre pour s’assurer de l’abandon.
Conclusion: à fortiori, ceci s’ applique en dehors de l’ autopsie.
DÉCRET du 28 juillet 1938 sur la police sanitaire des animaux domestiques.
Art. 19. — La destruction des cadavres d’animaux atteints d’une des maladies contagieuses … a lieu par enfouissement, incinération, cuisson ou par l’action d’agents chimiques, en suivant les règles et prescriptions qui seront fixées par ordonnance.
Conclusion: à fortiori, ce qui s’applique à des animaux, s’ applique aux citoyens.
Pour un autre juriste congolais, ancien magistrat : Il n’existe pas dans le code pénal congolais une protection particulière du cadavre en déhors de la mutilation ou de la destruction des tombeaux.
Voici ce que dit l’unique disposition consacrée au respect dû aux morts:
Article 111 : « Sera puni d’une servitude pénale d’un mois à un an et d’une amende de vingt-cinq à cinq cents zaïres quiconque aura détruit, abattu, mutilé ou dégradé : des tombeaux, signes commémoratifs ou pierres sépulcrales; des monuments, statues ou autres objets destinés à l’utilité ou à la décoration publique. »
Je pense qu’il faudra que législateur tienne compte de la culture congolaise en matière d’inhumation, pour protéger de manière toute particulière les cadavres afin d’éviter ce qu’on est en train de déplorer.
Des voix s’élèvent partout (au Congo et ailleurs) pour exiger une enquête impartiale
L’affaire de la fosse commune suscite déjà des réactions convergentes tant des congolais que des étrangers. Les ONG des droits de l’homme et plusieurs organisations congolaises de la société civile – dont l’Asadho ou L’Association congolaise pour l’accès à la justice (ACAJ) – exigent une enquête indépendante menée par les autorités congolaises et la communauté internationale. Au Parlement, le ministre Boshab fait l’objet des interpellations. Le président du Sénat, Léon Kengo wa Dondo serait appelé d’urgence pour s’expliquer auprès de l’Union européenne sur ces faits. Les sources proches du Sénat parlent d’une situation très embarrassante pour le pouvoir. « Ce n’est pas parce que ce sont des indigents qu’ils doivent être mis dans une fosse commune », a déclaré l’italienne d’origine congolaise Cécile Kyenge, vice-présidente de l’assemblée parlementaire de l’UE-Afrique Caraïbe- Pacifique, qui conduit la délégation qui a rencontré le ministre de la Justice, Thambwe Mwamba.
Sur son compte twitter, la chercheuse de Human Right Watch (HRW) Ida Sawyer a réclamé une « enquête rigoureuse et indépendante » pour « savoir si ces personnes disparues [lors de ces opérations] sont là », enterrées dans la fosse commune : « Le gouvernement doit conduire une enquête crédible pour faire la lumière sur cette affaire, notamment sur l’identité des personnes enterrées », dit-elle. Il faut rappeler que l’ONG américaine HWR soupçonne les services de sécurité congolais d’avoir enterré des victimes de deux vagues de répression dans une fausse commune de la région de Kinshasa. Selon HRW, il s’agirait de victimes de l‘opération Likofi, menée par la police entre novembre 2013 et février 2014 pour lutter contre les bandes des jeunes délinquants appelés Kuluna de Kinshasa, ou de la répression des manifestations et émeutes de janvier en réaction à un projet de réforme électorale.
La Belgique en première ligne. L’étau se resserre sur le régime Kabila ?
Comme en 1990 lors des événements du Campus de Lubumbashi, la Belgique hausse le ton. C’est ce qu’on peut lire sur le portail du Ministère belge des Affaires étrangères. Un communiqué du Vice-Premier Ministre et Ministre des Affaires étrangères, Didier Reynders, daté du 08 avril 2015 fait état de sa préoccupation suite à cette découverte macabre qui « pose de très nombreuses questions auxquelles la population congolaise et la Communauté internationale sont en droit d’attendre des réponses ». Le Ministre Didier Reynders demande qu’une enquête indépendante et crédible puisse immédiatement être diligentée pour faire toute la lumière sur cette affaire. Il importe par ailleurs de sanctuariser le site pour éviter la disparition de preuves et d’indices permettant de dire qui sont les personnes qui ont été enterrées et dans quelles circonstances elles l’ont été ». Mardi 7 avril, le Vice-Premier et Ministre de la Coopération au développement Alexander De Croo a accepté de disponibiliser 1,5 million d’euros en faveur du Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits de l’Homme (BCNUDH). Le gouvernement belge estime que le BCNUDH pourrait assister les autorités congolaises dans l’enquête, entre autres par l’interrogation de témoins.
Déjà sur le terrain, la MONUSCO, via le BCNUDH est décidée à accompagner la mission d’enquête diligentée par les autorités congolaises pour faire toute la lumière sur les circonstances qui entourent cette fosse commune découverte à Maluku. Le porte-parole intérimaire de la mission onusienne, Charles Antoine Bambara, l’a affirmé mercredi 8 avril au cours de la conférence hebdomadaire des Nations unies.
Pour le juriste-criminologue Jean-Bosco Kongolo analyste chez DESC : « Ça rappelle le vrai faux dossier des massacres des étudiants de l’Université de Lubumbashi qui avait déclenché le début de la fin du régime de Mobutu. Depuis ce temps-là, plus rien n’avait réussi à ce dernier. On dirait que toutes les forces cosmiques s’étaient liguées contre lui pour le couler. C’est juste un rappel de l’histoire, qui n’a rien de prémonitoire. »
Les criminologues de DESC disposés à apporter leur contribution – Appel à témoin pour constituer un dossier pénal
Tout en se mettant à la disposition de qui de droit pour apporter son expertise dans cette enquête, DESC lance un appel aux familles des victimes ou des personnes disparues ces derniers mois ainsi qu’aux témoins de se manifester et de nous signaler la disparition de leurs proches pour constitution des dossiers pénaux à charge des autorités congolaises. Nous garantissons la discrétion la plus absolue dans le traitement de cette affaire. 425 corps signifient plusieurs centaines de familles qui n’ont plus revu les leurs, c’est beaucoup. Il faudrait que les familles ainsi que les témoins arrivent à nous transmettre un maximum d’informations possible, nécessaires à l’identification des personnes disparues et des comportements suspects observés de la part des services de sécurité congolais.
Notre démarche est qu’une fois ces informations recueillies, en concertation avec M. Paul Nsapu de la FIDH, nous allons constituer un dossier à confier aux instances pénales internationales pour qu’elles diligentent une enquête internationale pour crimes contre l’humanité. Malgré le caractère politique de ces instances (tribunal des puissants), en attendant l’institution d’une justice indépendante, transparente et non inféodée au pouvoir politique, à l’état actuel des choses, nous ne savons pas à qui confier le martyre des populations cngolaises.
Nous rappelons que, suite aux nombreux indices et éléments de preuve recueillis, DESC est en train de finaliser également un dossier relatif aux événements de Lodja où une milice proche du ministre Lambert Mende a agressé des religieuses. (http://desc-wondo.org/depeche-desc-revision-de-la-constitution-premieres-victimes-a-lodja-le-fief-de-lambert-mende/). Le dossier, en analyse actuellement auprès de juristes spécialistes du droit pénal international, sera bientôt aux instances pénales internationales
Des responsables politiques et de sécurité susceptibles d’être traduits en justice en cas de confirmation des assassinats politiques
Nous reprenons ici des noms et la qualité des autorités susceptibles d’être poursuivies par la justice nationale et/ou internationale si jamais ce charnier est bel et bien celui des victimes des répressions de janvier 2015 ou d’autres bavures sécuritaires du régime Kabila. Il sied de rappeler que durant les événements de janvier 2015, nous avons pu entrer en contact avec une source experte dans une boîte informatique à Kinshasa. Il était parvenu à déjouer la coupure d’internet. Voici ce qu’il nous a confié : « Pally (Pseudonyme de JJ Wondo) ici nous sommes en guerre. Le campus de Kinshasa est attaqué par la GR. La population est décidée à RESISTER à l’armée et la police. Il y a des centaines de morts… Je te recontacte » (12h58 heures de Kinshasa, 20 janvier 2015) [6]. Une information confirmée par une autre source de la MONUSCO à Kinshasa (13h25 heure de Kinshasa). Ayant appris cette situation, j’ai (JJ Wondo) décidé d’appeler directement par téléphone le général Camille Bombele (Commandant de la région militaire de Kinshasa) et le colonel Seguin Ngoi Sengelwa, commandant de la LENI[7], l’ex-PIR[8] qui ne reçoit des ordres que directement du président Kabila, pour les enjoindre de cesser de tirer sur les manifestants. Ils m’ont répondu qu’ils ne faisaient qu’obéir à leur hiérarchie. J’ai insisté sur le fait que la loi permet également de désobéir à un ordre illégal lorsqu’il s’agit d’exécuter un ordre ne respectant pas les principes juridiques fondamentaux d’usage légal, proportionné et opportun de la force. Mais les intéressés m’ont simplement dit qu’ils faisaient leur travail [abattre des manifestants !]. Nous avons conservé les traces de ces conversations. Il semble de plus en plus plausible que lorsque les témoins nous parlent et décrivent des scènes de guerre généralisées dans la capitale en janvier 2015, que tout cela occasionne des victimes qui devraient se compter par centaines et non pas par dizaines. Dès le départ, DESC mettait en cause les chiffres provisoires avancés jusqu’à présent. DESC est bien au fait que les équipes de renseignement de la MONUSCO, chargées par la CPI, étaient à l’œuvre pour collectionner les preuves contre l’armée et les responsables politiques au pouvoir durant les manifestations de janvier 2015. Des services spécialisés et banalisés en tenue civile ont été discrètement déployés sur le terrain pour réaliser l’assessment des manifestions. Ces services sont le JOC (Joint opération center) [9], le JMAC (Joint mission analysis cell) et la UN Security ». A ce jour, nous sommes étonnés que le rapport du BCNUDH se fait toujours attendre. Nous espérons que ce rapport sortira en même temps que les résultats d’enquête actuelle sur le charnier de Maluku.
Une chose semble certaine, après s’être tiré une balle sur son pied en janvier 2015, par la cacophonie et les zones d’ombre qui entourent cette affaire de la fosse commune de Maluku dans sa communication, le régime Kabila semble enterrer davantage son contrat social et républicain avec le peuple congolais dont Kabila n’a que faire. Son silence et son indifférence, en sa qualité de prétendu père de la nation, après la dérive sécuritaire de janvier et cette découverte macabre, sont tout autant d’indices qui le culpabilisent aux yeux de l’opinion publique congolaise aix yeux de laquelle il apparait être responsable ou tout au-moins complice de la mort en série sans fin des Congolais depuis 1996, période où il a commencé sa carrière militaire sur le sol congolais sous l’uniforme du FPR (Front patriotique rwandais) qui a fini par le propulser au sommet de l’Etat en 2001.
Les autorités politiques et militaires mises en cause et passibles des poursuites pénales
Les officiels, les officiers généraux et supérieurs sous-mentionnés, sont techniquement, pénalement et individuellement responsables, au regard des prérogatives de leurs fonctions respectives, des 41 victimes et d’autres cas de violations et d’atteintes graves aux droits humains et à l’intégrité physique des populations civiles conformément au droit pénal national et international.
Il s’agit de :
Joseph Kabila Kabange, Chef de l’Etat, commandant suprême des FARDC et de la Police nationale. La Garde républicaine dépend directement de son cabinet militaire dirigé par le Général Olenga.
Auggustin Matata, Premier ministre et chef du Gouvernement. Il coordonne la politique nationale et sécuritaire du pays.
Pierre Lumbi Okongo, Conseiller spécial de Kabila en matière de sécurité, il conseille Kabila sur les grandes options stratégiques à prendre en matière de sécurité interne (dont l’ordre public) et externe du pays.
Général François Olenga : Chef d’état-major privé de Kabila. C’est l’actuel bras droit militaire de Kabila qui lui conseille sur les options stratégiques et opératiques à prendre en matière de sécurité militaire. Il a sous ses attributions l’autorité directe et fonctionnelle de la GR.
Général Didier Etumba : Chef d’état-major général des FARDC qui chapeaute toutes les forces armées de la RDC, y compris la GR.
General Constant Hughues Ilunga Kampete : commandant de la Garde républicaine (GR) qui a ordonné à ses hommes d’agir de la manière la plus ferme et sans état d’âme contre les manifestants.
Général Gabriel Amisi Tango Four : Commandant de la 1ère zone de défense comprenant les provinces de l’Equateur, du Bandundu, du Bas-Congo et de Kinshasa où se déroulent les opérations militaires contre des civils non armés. Il a sous sa responsabilité opérationnelle directe les unités des 41ème, 42ème et 43ème bataillons des forces de réaction rapide (FRR) retirés de Beni depuis juin 2014.
General Dieudonné Banze : chef d’état-major de la force terrestre et ancien commandant de la GR pour la supervision des opérations militaires des FRR
Général Camille Bombele Luwala : Commandant de la 14 région militaire correspondant à la ville de Kinshasa, secteur opérationnel sous son commandement direct. Il était déjà le chef des opérations contre les adeptes du prophète Mukunguble en décembre 2013 et de la répression des partisans de l’opposition qui conspuaient le cortège de Joseph Kabila le 26 novembre 2011.
Général Charles Bisengimana : Commissaire général de la Police nationale congolais (PNC) en tant qu’autorité hiérarchique et fonctionnelle de toute de la PNC qui décide et approuve toutes les opérations de police d’envergure menées sur le terrain.
Général Célestin Kanyama, l’Inspecteur divisionnaire adjoint de la PNC. Kanyama est indexé par le rapport du Bureau Conjoint des Nations-Unies aux Droits de l’Homme (BCNUDH) sur les violations des droits humains commises par des agents de la PNC dans le cadre de l’opération « Likofi » (coup de poing), destinée à traquer les jeunes délinquants de Kinshasa appelés communément « Kulunas ».
General Seguin Ngoi Sengelwa : commandant de la Légion nationale d’intervention (LENI). Il est très proche de Kabiĺa. C’est généralement cette police qui intervient pour mâter les opposants de Kabila. Il joue un rôle très important dans le dispositif sécuritaire de Kabila en RDC, plus particulièrement à Kinshasa.
Général Jean-Claude Yav Kabej, ancien directeur des renseignements militaires (la Démiap), est l’adjoint du général Olenga à la maison militaire du chef de l’Etat congolais.
Général Kalev Mutond, Administrateur général de l’ANR : le service de renseignement civil
Professeur Jules Katumbwe Bin Mutindi : le directeur provincial de l’ANR pour Kinshasa.
Georges Monga, Directeur des opérations de l’ANR qui reçoit ses ordres directement de Kabila qu’il rencontre pratiquement tous les jours pour faire rapport.
Général Ekutshu Wanzanga Michel : Adjoint chargé des Opérations et Renseignement dans la 1ère zone de défense.
Général Tangala Guillaume : adjoint chargé de l’Administration et Logistique dans la 1ère zone de défense
Général Dzaringa Lotshima Robert : Chef d’état-major de la zone de défense dans la 1ère zone de défense.
Général Crispin Tshiwewe Songesa : chargé des renseignements au sein de la GR
Colonel Waliuzi Kilandi Albati : responsable de l’administration et de la logistique. C’est lui qui équipe les éléments de la GR lors des opérations.
Colonel Ngoy Ndombe Ignace : Chef d’état-major de la Garde Républicaine. C’est lui qui planifie toutes les opérations militaires et la mise en conditionnement des troupes de la GR.
Colonel Djadjidja : Commandat du batallons PM (police militaire) du Camp Kokolo dont les éléments, sous les ordres du Général Etumba, ont commis beaucoup de bavures lors des manifestations du mois de janvier derniers. Une source le décrit plus brutal que le Général Célestin Kanyama
Professeur Aimé Ngoy Mukena : Ministre de la défense Nationale. Il est le responsable de la gestion quotidienne des Forces Armées, notamment en ce qui concerne l’administration et l’approvisionnement des FARDC.
Professeur Evariste Boshab : Ministre de l’Intérieur et de la Sécurité. Il est le responsable du maintien de l’ordre public, de la sécurité publique et protection des personnes et de leurs biens. Il exerce également l’autorité fonctionnelle et hiérarchique sur la Police Nationale et les services de sécurité.
Jean-Jacques Wondo Omanyundu – Exclusivité DESC
[1] http://www.rtbf.be/info/monde/detail_rdc-une-fosse-commune-contenant-425-corps-decouverte-pres-de-kinshasa?id=8949534.
[2] http://www.rtbf.be/info/monde/detail_rdc-une-fosse-commune-contenant-425-corps-decouverte-pres-de-kinshasa?id=8949534.
[4] Service de renseignement militaire.
[5] Service de renseignement civil.
[6] http://desc-wondo.org/flash-desc-la-garde-republicaine-prepare-un-assaut-au-campus-de-kinshasa/#sthash.1kkHBalj.dpuf.
[7] Légion nationale d’intervention formée par l’Union européenne.
[8] Police d’intervention rapide.
[9] Le JMAC est le service de récolte et de traitement de l’information, de renseignement. C’est le service secret de la MONUSCO.
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