Publié le avril 23, 2012by mpp
500 millions de dollars de la Banque mondiale partis en fumée
Le Congo-Kinshasa empêtré dans un scandale de
corruption On en parlait déjà à Kinshasa à propos de la restauration des routes
de la capitale. La qualité du travail, en plus de la lenteur pour l’exécution
des travaux suscitait plusieurs interrogations. Pas plus tard qu’il y a de cela
un mois, les responsables de la Banque mondiale à Kinshasa se sont entretenus
avec le hauts cadres de la presse sur le fonctionnement des structures de la
Banque mondiale. C’est ainsi qu’à une question de la presse de savoir pourquoi
des personnalités qui ont travaillé au sein du Bureau central de coordination,
Bceco, sous la direction de Matata Ponyo se sont retrouvés au sein de l’Ucop,
une autre structure qui exécute quasiment les mêmes fonctions que le Bceco. Il
était question de savoir si par là, la Banque mondiale n’entretenait pas la «
corruption » comme dénoncée depuis un certain temps.
La réponse, très
étendue, justifiait amplement que la question était pertinente. Comme pour dire
qu’il n’y avait pas de fumée sans feu.
Voilà que le journal Le
Figaro, paraissant en France, revient sur le dossier. Un véritable scandale. A
l’image du Potentiel qui s’interrogeait sur le silence des instances
internationales, Le Figaro se pose la même question sur ce silence alors que le
Bceco, le Programme national multisectoriel de lutte contre le Sida… sont
pointés du doigt. Au-delà, certains membres du gouvernement. Le Figaro en parle
en long et en large. La Communauté internationale ferme les yeux Les vieux
démons de la corruption sont-ils de retour en République démocratique du Congo
?
Plus de 500 millions de dollars, émanant des caisses de la
Banque mondiale, se sont envolés en fumée au cours des cinq dernières années.
«Du déjà-vu…», disent les plus blasés. «Un scandale !», assurent ceux qui
croyaient au discours de bonne gouvernance du régime Kabila et au sérieux de la
Banque mondiale. La communauté internationale, qui finance les deux tiers du
budget de l’ex-Zaïre, ferme les yeux avec complaisance… «Si l’on avait jeté les
billets par les fenêtres d’un avion, on aurait eu plus de chances d’atteindre
les plus pauvres…» La réflexion vient d’un ex- responsable de la Banque mondiale
(BM). Avec certains de ses collègues, il a prévenu le département de Déontologie
institutionnelle de Washington. Des dizaines de plaintes d’opérateurs
économiques sont venues grossir le dossier. La direction de la BM a ordonné une
enquête. La mission d’experts, qui s’est déroulée en RDC du 17 février au 23
mars, n’a toujours pas rendu ses conclusions… Conflits d’intérêts, délits
d’initiés, fraude L’affaire est de taille. Quand, en 2001, la communauté
internationale décide de reprendre sa coopération avec l’ex-Zaïre, elle met en
place des agences d’exécution chargées de coordonner les fonds. Avec le Bureau
central de coordination (Bceco) sont ainsi créés le Programme national
multisectoriel de lutte contre le Sida (PNMLS), la Commission nationale de
désarmement, démobilisation et réinsertion (Conader)… Ce sont ces agences qui
sont aujourd’hui sur la sellette pour conflits d’intérêts, délits d’initiés,
fausses déclarations, corruption, fraude. «C’est parce qu’il n’y avait plus
d’administration publique digne de ce nom que ces agences ont été créées. Elles
auraient dû, en principe, avoir des garde-fous. Mais leurs responsables
congolais ont refusé les contrôles, ou les ont contournés. Et la communauté
internationale a fermé les yeux…», explique un responsable, qui tient à garder
l’anonymat. Les dispositifs de contrôle ayant été rapidement neutralisés, la
voie a été ouverte à tous les abus. Dans l’attribution des marchés de
construction de routes, par exemple, on a assisté à toutes sortes
d’irrégularités. Un marché de 18 millions de dollars a ainsi été attribué à une
société ivoirienne, TPZC, dont la principale activité de cette société était… la
boulangerie ! Ses bilans portaient de faux tampons de l’administration
fiscale ivoirienne, ses renseignements bancaires étaient erronés et le chèque de
garantie qui lui a été demandé est revenu impayé… Les exemples sont identiques
dans les autres agences d’exécution. Des centaines de milliers de
dollars ont été attribués à un chanteur pour un refrain sur le Sida, des fonds
destinés aux soldats se sont évaporés. A qui la faute ? Comme le
soulignent les initiateurs de l’opération mains propres de la Banque mondiale,
«Nos propres agents ont été trop complaisants». Quand un appel d’offres de
quatre lots de 20 millions de dollars est lancé un vendredi pour être attribué
le lundi suivant, sans que le moindre contrôle soit effectué, on se demande si
le responsable local de la Banque mondiale a pris le temps de vérifier quoi que
ce soit. «D’habitude, on nous reproche d’être trop lents. Cette fois, on a été
trop rapides…», explique un responsable, Xavier de Victor. À ce jour, vingt-deux
mois après l’attribution des marchés et alors que le délai d’exécution est
expiré, moins de 20% des travaux sont réalisés. Le chef de projet à la Banque
mondiale «assume toutes les décisions prises» et attend «avec impatience» les
résultats de l’enquête interne du département de Déontologie institutionnelle.
Il vient d’être discrètement dessaisi de ses dossiers. Parfaitement informés de
la situation, les bailleurs de fonds n’ont pas tenu à réagir. Ils affirment
avoir été les premiers surpris. «Comme le gouvernement est composé de toutes les
tendances – président, anciens rebelles, opposition intérieure –, on pensait
qu’ils se surveilleraient les uns les autres. En fait, tout le monde s’est très
bien entendu sur le partage du gâteau…», confie un responsable
européen.
LE GRAND SCANDALE Les Congolais, eux, ne se font plus
d’illusions. Le mémorial que le président Kabila avait promis en face du
Parlement n’est qu’un immense terrain vague, qui a quand même coûté un
demi-million de dollars. Quant aux étudiants, ils ne cessent d’ironiser sur
l’état de la route qui mène à l’université. Sa réhabilitation a déjà
coûté près de 9 millions de dollars à la communauté internationale pour 9 km,
soit un million de dollars par kilomètre.
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